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de la respiration végétale. Il explique ainsi pourquoi la végétation est languissante à l’ombre des grands arbres dans le bain de la lumière verte. Cette découverte de M. Gailletet a été, il est vrai, vivement contestée dans ces derniers temps, mais elle a été aussi défendue, entre autres par M. Bert, et nous verrons plus loin qu’elle est en harmonie avec tout le système des actions de la lumière dans les deux règnes vivans[1].


La science en était là, il y a un an, lorsqu’un botaniste très distingué, M. Prillieux, fit connaître le résultat d’une série d’expériences faites dans un esprit tout différent, et où l’action de la lumière est étudiée à un point de vue nouveau. S’appuyant sur cette double considération, que les différens rayons colorés ne sont pas également lumineux, et que les rayons qui agissent le plus sur les plantes sont aussi ceux qui ont le plus grand pouvoir éclairant, M. Prillieux a voulu rechercher quelle influence peuvent produire sur les plantes des lumières de couleur diverse, mais d’intensité reconnue égale, et si cette influence est différente d’une couleur à l’autre ou si elle est la même à égalité de pouvoir éclairant. Les recherches consciencieuses et longues de cet expérimentateur l’ont conduit à admettre que les lumières de couleurs diverses agissent à un égal degré sur les parties vertes des plantes, et y déterminent un égal dégagement de gaz pour une même intensité lumineuse. Tous les rayons lumineux déterminent, selon lui, la réduction de l’acide carbonique par les végétaux proportionnellement à leur pouvoir éclairant, et quelle que soit leur réfrangibilité. Si les rayons jaune et orangé sont plus actifs à cet égard, c’est que leur éclat lumineux est bien plus grand que celui des rayons extrêmes.

Les rayons lumineux favorisent également la production du tissu vert, de la matière verte de tous les végétaux. Les jardiniers, pour faire pâlir certaines plantes, les élèvent dans l’obscurité. Ils obtiennent ainsi des herbes jaune pâle, étiolées, sans vigueur et sans ressort. Elles sont atteintes d’une véritable chlorose, et dépérissent comme si elles étaient nées dans un sable stérile. Le soleil aide aussi à la transpiration des plantes et au renouvellement continu de l’humidité bienfaitrice dans leurs tissus. Quand l’humidité ne s’évapore pas, la plante tend à devenir hydropique, et ses feuilles tombent par suite de la faiblesse de la tige.

Cet amour des plantes pour la lumière, qui est un des besoins les plus impérieux de leur existence, se manifeste par d’autres phénomènes intéressans, et où l’on voit que les rayons solaires sont bien réellement l’engrais qui donne la couleur. La corolle des

  1. M. Bert a constaté que la lumière verte tue le mouvement des sensitives.