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l’appel qu’on leur adresse. On a déjà fait beaucoup pour eux ; il faut qu’on fasse plus encore, tant on a besoin de leurs services. Or il n’y a que deux moyens de se les attacher, ou une solde exagérée ou un avancement aussi avantageux que dans les corps civils. C’est ce dernier moyen qui évidemment doit avoir la préférence.

Déjà ces hommes, jugés à l’œuvre, jouissent dans l’armée de mer d’une considération qu’ils ont lentement et dignement acquise. Quand on est témoin de leur zèle, quand on a pu apprécier leurs fatigues, le soin constant qu’ils apportent à la conservation et à l’amélioration de leur matériel, on conçoit pour eux une estime qui ne fait que grandir. Doués d’une instruction très étendue, habitués par une solde élevée à un certain bien-être, ils ne sont nullement déplacés au milieu de nos officiers quand, arrivés aux grades de mécaniciens principaux, ils vont s’asseoir à leur table. Faut-il leur montrer en perspective l’épaulette d’officier et même d’officier supérieur ? faut-il les encourager à passer des examens qu’ils subiraient d’une façon brillante, grâce à leurs notions théoriques, et qui pourraient leur donner comme aux autres officiers de marine le grade d’enseignes de vaisseau ? C’est à y réfléchir. Peut-être y aurait-il pour ces auxiliaires si méritans une issue plus naturelle, c’est le corps des ingénieurs de la marine, auquel il serait facile de les rattacher. Tout cela peut se faire, mais il serait urgent de faire quelque chose, car il n’y a point pour le mécanicien, comme pour les autres ouvriers maritimes, de service obligatoire, et si l’état n’en vient pas à des propositions qui soient de leur gré, il risque fort de les voir quitter les services administratifs pour des services privés, plus rétribués la plupart et surtout moins assujettissans.

Parmi les matières à étudier sur le papier et sur le terrain, l’escadre de la Méditerranée ne négligea pas les compagnies de débarquement, matière ingrate, grâce surtout aux préventions qui règnent à ce sujet dans une portion de la flotte. On admet que, mêlées à la troupe, infanterie de terre ou infanterie de marine, les compagnies de débarquement, composées de marins, soient un élément utile et des auxiliaires très appréciés ; on doute qu’isolément elles puissent être employées ailleurs que dans des escarmouches ou d’audacieux coups de main. A l’appui, on cite quelques échecs où les hommes débarqués n’ont pas tenu pied et se sont assez mal tirés d’une besogne qui n’est pas la leur. À ces objections, à ces préventions, il n’y avait qu’une réponse à faire, c’était de donner, par des moyens appropriés, une plus grande valeur militaire à nos compagnies de débarquement. On s’y appliqua sur l’escadre d’évolutions, le commandant en chef saisit pour cela toutes les occasions qui s’offrirent. Que de motifs pour le tenter et y persister, non-seulement comme essai passager, mais encore comme habitude