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indispensables pour les faire prospérer ; les plantes d’été de grande culture, les pommes de terre, les légumes secs, feront en partie défaut. On peut donc s’attendre à une année difficile, mais qui le sera moins cependant que les années de pénurie et de disette qui ont été la conséquence de pluies très abondantes.

C’est surtout la récolte des fourrages qui est atteinte ; elle est presque nulle dans la plupart de nos départemens. Jusqu’à ce jour, les marchés de bestiaux sont largement approvisionnés. Les cultivateurs vendent les animaux qu’ils ne peuvent pas nourrir, et cela donne de la viande sur pied à bon marché, sinon de première qualité ; mais il faut prévoir les conséquences du dépeuplement de nos étables, et c’est avec raison que l’on se préoccupe des moyens de nourrir les animaux. On peut remédier à la pénurie des fourrages de deux manières : d’abord en augmentant par la culture les ressources alimentaires, ensuite en utilisant le mieux possible celles dont on peut disposer, et en introduisant même dans le régime des animaux des produits qui n’y entrent pas en temps normal.

Ce qui rend la position des agriculteurs difficile, c’est surtout la presque impossibilité de faire des cultures dérobées, d’intercaler entre les cultures principales des fourrages d’été, qui remplacent si avantageusement le foin lorsque, comme cette année, le rendement des prairies artificielles et naturelles est inférieur à ce qu’il est ordinairement. Ainsi le maïs, qui, semé à la volée, donne une si abondante récolte de fourrage vert, le sarrasin ordinaire et le sarrasin de Tartarie, qui réussissent dans les sols les plus maigres, le millet d’Italie (panicum italicum), le millet ordinaire (panicum milliaceum), le moha (panicum germanicum), n’ont pas pu être semés à cause de la sécheresse, ou n’ont pas levé là où on les a ensemencés. A plus forte raison, il a fallu renoncer aux produits que donnent dans les années normales l’avoine, les pois gris, la gesse d’été, les vesces, ces plantes étant plus encore que les précédentes atteintes par la sécheresse.

Toutefois les cultivateurs ne doivent pas se décourager. Il importe de profiter des pluies, même peu abondantes et passagères, pour semer quelques plantes robustes et d’une végétation rapide. Nous leur recommandons surtout le maïs, les millets, les sorgho, le sarrasin, la moutarde blanche, la navette d’été. Toutes ces plantes peuvent être semées jusqu’en septembre, surtout quand on ne veut les utiliser que comme fourrage. Le maïs, les millets cultivés, les sorgho, sont des plantes des pays chauds ; elles peuvent résister à la sécheresse. Le sarrasin, qui peut être semé sur les plus mauvaises terres, permet de rendre productives les bonnes terres qui, cette aimée, sont comparables aux mauvaises en temps normal. En semant ces plantes seules ou en mélange, les cultivateurs se