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France pourquoi l’orge suffit aux chevaux d’Orient, tandis qu’elle rend fourbus les chevaux de nos contrées. Si le climat agit dans cette circonstance, son action est bien secondaire. L’orge ou quelquefois la fève remplace l’avoine en Afrique, parce qu’elle est associée à de la paille, aliment très riche en principes carbonés relativement à ses principes azotés. « J’ai voulu savoir, disait un voyageur qui avait été frappé de la vigueur des chevaux et même des ânes égyptiens, comment sont nourris ces ânes du Caire qui font dans la journée quinze heures de marche sans s’être mis le plus petit bout de chardon ou le moindre grain d’avoine sous la dent… J’ai reconnu que leur nourriture est la même que celle des excellens petits chevaux de Constantinople, c’est-à-dire de la paille hachée très menu et mélangée avec des fèves. Il faut croire que cette provende a des qualités nutritives extraordinaires, car aucune monture de notre pays, si bonne qu’elle soit, ne saurait lutter avec le dernier cheval de Stamboul ou avec le dernier âne du Caire. » Ces qualités nutritives extraordinaires résultent de la juste proportion des divers principes immédiats qui se trouvent dans la ration. Le mélange, — paille foulée ou hachée et orge, — que les Arabes de l’Algérie donnent à leurs chevaux représente très approximativement la ration, foin et avoine, que nous distribuons en Europe. En effet, 3 kilogrammes de paille et 4 kilogrammes d’orge contiennent à peu près autant de principes plastiques et plus de principes respiratoires que 2 kilogrammes de foin et 4 kilogrammes d’avoine. Sans carbone et sans hydrogène, les chevaux ne marcheraient pas mieux en Afrique qu’en France.

Pendant la campagne du Mexique, nos chevaux ont été presque exclusivement nourris de mais. M. Liguistin, vétérinaire en chef de l’expédition, a constaté les bons effets de cette alimentation sur la force, l’énergie, la santé de nos chevaux. Par sa composition chimique, ce grain se rapproche beaucoup des alimens types. Il contient même un peu plus de carbone que le foin et que l’avoine, et surtout beaucoup plus de corps gras, ce qui permet de lui adjoindre des alimens fortement azotés, et de constituer des rations vraiment économiques ; Ainsi 3 kilogrammes de mais et 1 kilogramme d’orge, de seigle ou de sarrasin représentent à peu près 5 kilogrammes d’avoine et coûtent beaucoup moins cher. Quand le maïs forme la base d’une ration, on peut y introduire des féveroles, et l’on a un mélange dans lequel tous les élémens nutritifs sont fournis au plus bas prix : 4 kilogrammes maïs, 500 grammes féveroles et 1 kilogramme de paille hachée représentent plus de 6 kilogrammes d’avoine. Enfin un mélange des plus avantageux est celui du mais avec une petite quantité de foin des légumineuses : 2 kilogrammes de luzerne et 8 kilogrammes de mais donnent les mêmes élémens