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est inégal, et bientôt il devient aussi impraticable que par le passé. Les subventions que l’état alloue aux communes, les avances qu’il leur fait dans des conditions onéreuses pour lui et très avantageuses pour elles, lui donnent le droit, lui imposent le devoir de tenir la main à ce qu’une œuvre si laborieusement accomplie soit conservée aux générations futures. Toutefois il ne suffirait pas d’imposer aux communes l’obligation d’entretenir le nouveau réseau, il faudrait leur en procurer les moyens. Dans beaucoup de cas, la restitution à la petite vicinalité des prélèvemens qui d’abord étaient opérés en faveur des chemins de grande et de moyenne communication donnera les fonds nécessaires. Au besoin, on pourra rendre obligatoire pour les communes le vote des 3 centimes de la loi de 1867 ou de la quatrième journée de prestation que la loi de 1868 les autorise à y substituer. On pourvoira au surplus, soit en demandant aux départemens de supporter sur leurs ressources propres l’entretien des chemins de grande communication, qui sont, à vrai dire, des routes départementales de deuxième ordre, soit en les autorisant à créer une sorte de fonds commun qui permettrait aux conseils-généraux de subvenir aux besoins des communes les plus obérées. La solution de la difficulté nous semble consister en un concours donné à un titre quelconque aux communes par le département au fur et à mesure que celui-ci sera dégrevé des dépenses de construction des lignes de grande communication et d’intérêt commun.

En résumé, le programme arrêté par la loi du 11 juillet 1868 se poursuit dans des conditions satisfaisantes. Quelle impression produit-il sur l’esprit des populations ? Toute appréciation sur ce point serait prématurée. On a reproché au gouvernement de n’avoir eu en vue, en s’occupant des chemins vicinaux, qu’un succès politique. Il ne lui était sans doute pas défendu de chercher un élément d’influence dans un acte d’administration intelligente ; mais nous croyons qu’il avait des visées plus hautes et qu’en même temps il ne se faisait pas d’illusions exagérées. Ce n’est pas au moment où commence une entreprise de cette nature qu’elle est populaire. Il faut d’abord traverser une période de travaux, d’efforts, de sacrifices, pendant laquelle le cultivateur, sans jouir encore du résultat, voit s’élever le chiffre de son impôt. L’opération se présente donc aux populations par le côté qui peut exciter un certain mécontentement. A mesure que ces charges momentanées s’allégeront, que l’ouverture des chemins nouveaux rendra plus facile la circulation des personnes et plus économique celle des denrées, les habitans des campagnes en apprécieront mieux les avantages. Combien ne rendrait-on pas plus saisissans pour eux des progrès dont la