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LE
DÉPEUPLEMENT DES EAUX
DE FRANCE


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Le moment est certainement venu d’envisager la possibilité d’une disette prochaine et de rechercher quelle aurait pu être, en face d’une pareille éventualité, l’importance du peuplement complet des eaux de notre pays. Toutefois les moyens d’obtenir ce résultat ne seront bien compris que lorsque nous aurons passé en revue les causes principales qui ont fait disparaître le poisson de nos eaux. Pour tous ceux qui connaissent ces matières, le fait du dépeuplement est chose patente ; pour la masse du public, il est beaucoup moins évident, d’autant que peu de personnes possèdent des données précises sur ce que doit être un peuplement complet.

En principe, on peut établir que tout cours d’eau qui ne produit pas le maximum de poisson dont il est susceptible laisse à désirer au point de vue du rendement, et dès lors doit être soumis à un traitement scientifique rationnel. En fait, pas un seul de nos cours d’eau, grands ou petits, ne produit ce maximum : tous en sont fort loin. On a pu acquérir cette certitude en comparant leur rendement avec celui de certaines eaux fermées convenablement aménagées ; mais cela ne suffirait pas encore pour prouver que le dépeuplement relatif existe, et qu’il fait sans cesse les plus tristes progrès. Il faut, pour s’en convaincre, se reporter aux statistiques spéciales et à celles des principaux marchés de France, dans lesquels on tient compte des entrées ; alors on s’apercevra que, malgré l’accroissement du prix total, qui tient au renchérissement continu de toutes les denrées alimentaires et peut-être aussi à la rareté croissante du poisson, la quantité en matière va en diminuant, ou, ce qui revient au même, est loin de suivre le mouvement de la consommation. C’est l’inverse de ce que l’on obtient pour les produits de la terre ;