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A l’île Bourbon, comme à Maurice et à Rodriguez, les premiers explorateurs rencontrèrent beaucoup d’oiseaux lourds et incapables de fuir. Une espèce voisine du dronte de Maurice, signalée par Dubois, ainsi que par le Hollandais Bontekoe et l’Anglais Castleton, était toute blanche comme un jeune mouton. Le portrait de cet oiseau a été trouvé récemment sur une vieille peinture ; c’est un vrai dodo blanc, avec une teinte jaune sur les ailes. Un solitaire observé par le voyageur Carré en 1668, vraisemblablement très distinct de l’espèce de Rodriguez, était magnifique ; « la beauté de son plumage, dit la relation, fait plaisir à voir, c’est une couleur changeante qui tire sur le jaune. » Un gros oiseau bleu avec le bec et les pieds rouges était, suivant toute probabilité, du groupe des superbes poules sultanes, que les zoologistes nomment les porphyrions et les notornis. Tous ces oiseaux ont entièrement disparu.

Plusieurs espèces, maintenant anéanties, habitaient spécialement l’île Maurice, comme le dronte, il y a moins d’un siècle et demi. François Cauche, ainsi qu’un missionnaire protestant du nom de Hoffmann, a signalé des « poules rouges au bec de bécasse » qu’on prenait à la main en leur présentant un morceau d’étoffe rouge. Déterminer l’espèce d’après une indication aussi vague eût été difficile, mais une bonne fortune s’est offerte récemment. Des peintures sur vélin ont été découvertes dans la bibliothèque particulière fondée par l’empereur d’Autriche François Ier ; l’une représente le dronte, une autre la poule au bec de bécasse. M. de Frauenfeld a publié ces images, et, très frappé des caractères extraordinaires de la poule rouge qui est privée d’ailes, il a fait de cet oiseau le genre Aphanapteryx (Aphanapteryx imperialis), sans parvenir toutefois à déterminer les rapports naturels de l’animal. Plus heureux, M. Alphonse Milne Edwards avait eu des os tirés de la fameuse Mare aux songes, et il a parfaitement reconnu dans l’aphanapteryx un type de la famille des ralles. C’est à cette famille et particulièrement au groupe des ocydromes, surtout représenté en Australie, que le même zoologiste a pu rattacher, d’après l’inspection d’un débris, les grasses gelinottes vêtues d’un plumage gris clair, dont Leguat avait fait ses délices pendant son séjour à Rodriguez. Leguat, notre historien exact des îles Mascareignes au temps passé, a tracé encore la description d’un oiseau bien remarquable qui habitait les marais de l’île Maurice. « On voit beaucoup de certains oiseaux, dit ce voyageur, qu’on appelle géans, parce que leur tête s’élève à la hauteur de six pieds. Ils sont extrêmement haut montez et ont le corps fort long. Le corps n’est pas plus gros que celui d’une oie. Ils sont tout blancs, excepté un endroit sous l’aile qui est un peu rouge. Ils ont un bec d’oie, mais un peu plus pointu, et les doigts des pieds sont un peu séparés et fort longs. Ils paissent dans les lieux