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temps de se délasser un peu ; n’est-il pas juste que cinq ou six fois dans l’année s’entre-choquent gaîment les verres ?

On comprendra que nous ne puissions pas suivre M. Ponce dans l’énumération des soins nécessaires aux dix-sept familles de plantes qui sont cultivées dans les marais. La partie la plus importante de l’art du maraîcher consiste d’ailleurs presque tout entière dans l’emploi raisonné de l’engrais. Cet engrais est toujours le fumier d’écurie ou, à défaut du fumier d’écurie, le fumier d’étable. La gadoue, ce mélange de débris de toute nature que produit le balayage de nos rues, est transportée au-delà de la zone des marais, et convient aux cultures agricoles dont nous avons parlé plus haut. Les maraîchers se procurent le fumier d’écurie par abonnemens passés avec les entrepreneurs de transports, les compagnies de petites voitures et des omnibus, les casernes de cavalerie, etc. Le fumier d’étable est fourni par les nourrisseurs. Le premier est indispensable aux sols argileux ; le second, plus froid et d’une décomposition plus lente, est réservé surtout aux sols siliceux ; on en fait le mélange selon les proportions d’argile et de silice que contient la terre. Comme l’espace est précieux, la fumière du maraîcher occupe le moins de place possible et gagne en hauteur ce qu’on lui refuse en surface. « On lui donne, dit M. Ponce, la forme d’un quadrilatère placé sur une surface bien plane et aussi imperméable que possible… Les fumiers sont entassés à la fourche et foulés avec le pied au fur et à mesure du déchargement. On ménage au centre du tas une espèce de cheminée à laquelle on fait aboutir sur toutes les faces d’autres conduites horizontales, de façon que l’air frais pénètre dans le tas et neutralise l’excès de chaleur produit par la fermentation, chaleur qui peut aller jusqu’à enflammer la masse. » Le danger d’incendie est même assez considérable pour qu’on écarte la fumière à 10 mètres au moins de l’habitation. Par la même raison, on la rapproche toujours du puits. Comme l’humidité toutefois lui serait nuisible, et que les pluies en entraîneraient les parties solubles, on prend soin de la garantir de l’eau. On l’élargit donc autant qu’on peut de la base au sommet, on lui donne des pentes vers les bords, et l’on garnit le haut de la paille la plus longue et la moins souillée. « Le tas de fumier ainsi construit contient au sommet du fumier frais qui produira beaucoup de chaleur dès qu’il sera enfoui et mouillé, mais qui ne deviendra engrais que huit jours au moins après l’enfouissement. La deuxième partie, intermédiaire entre le sommet et la base, contient du fumier demi-chaud, demi-engrais, qui convient à la plantation des végétaux délicats demandant à la fois chaleur et nourriture en abondance. L’autre tiers se compose de fumier fait, bon pour les plantes robustes qui ne demandent plus que de la nourriture. » Pour diminuer l’énorme quantité d’engrais qu’exige la culture des primeurs, on a tenté divers essais abandonnés presque aussitôt parce qu’ils étaient