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brigands, ou même les loups des montagnes. A l’intérieur, ils avaient des fêtes, des exercices, des jeux sacrés, qui leur étaient communs, toute une éducation à la fois militaire et civile qui les préparait directement à leur futur rôle de citoyens. Lorsque Athènes eut perdu avec son indépendance, son rôle politique, elle n’en resta pas moins la ville de la religion et des lettres, et le collège éphébique devint une sorte d’athénée ou d’université conservant à la fois les traditions du culte et celles de l’enseignement. Comme autrefois, les jeunes gens y adoraient les dieux suivant les rites consacrés ; plus que jamais, sous la conduite de nombreux maîtres, ils s’y exerçaient à la musique, à la danse et à la poésie. Chaque année, on inscrivait sur le marbre les noms de ceux qui avaient remporté le prix dans chacun de ces exercices ; on y ajoutait les noms des magistrats ou professeurs particuliers au collège éphébique, et même on gravait au début les noms des magistrats publics qui se trouvaient alors en fonction. Or on a trouvé dans Athènes, depuis quelques années seulement, grâce à la démolition d’un mur de la ville composé de ces débris, des centaines de nouvelles inscriptions éphébiques ; on a maintenant par ces marbres une sorte d’histoire de l’université athénienne à travers plusieurs siècles, particulièrement pendant presque toute la période occupée par l’empire romain. Grâce à tant de noms de fonctionnaires, la plupart annuels, chacun de ces marbres est évidemment un groupe de précieuses indications chronologiques, à condition qu’on les interprète les unes par les autres à l’aide d’une comparaison attentive et d’une critique aiguisée. C’est ce genre de travail qu’avait entrepris l’an dernier M. Richard Neubauer, à Berlin (Commentationes epigraphicæ),et qu’a repris M. Dumont.

M. Dittenberger, de Gœttingue, M. Urlichs, M. Heinrich, avaient traité précédemment de l’éphébie attique, mais sans aborder avec résolution le problème chronologique. Ayant un grand nombre de marbres éphébiques sous les yeux, marbres conservés presque tous aujourd’hui au musée d’Athènes et dont les inscriptions ont été publiées par les recueils grecs, l’Ephéméride archéologique, les Inscriptions inédites, etc., lisant sur ces marbres les noms des dignitaires ou des magistrats de chaque année, M. Dumont a pu remarquer qu’en plusieurs occasions certains noms se trouvaient répétés en même temps qu’ils étaient appliqués à des fonctions ou dignités éphébiques différentes. Il en a conclu qu’il pouvait établir ici comme dans l’histoire romaine une sorte de cursus honorum, le même magistrat éphébique ayant pu être d’abord hégémon, puis paidotribe, puis cosmète ; il s’est aidé surtout des marbres qui indiquent, alors que ces magistratures sont devenues viagères, depuis combien d’années tel dignitaire y a été élevé. Ces indices et bien d’autres aidant, il est parvenu, à force de calculs ingénieux, de comparaisons fécondes, de subtiles inductions, à dater un grand nombre de ces marbres