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déraillé, jamais rompu ni brûlé le moindre essieu ; bien rarement le train est arrivé en retard. Enfin il résulte de documens officiels que pour l’année administrative commençant au 1er octobre 1872 et finissant au 30 septembre 1873, sur le chemin de fer de l’Erié, qui a toujours été cité, à tort ou à raison, comme celui qui était le plus mal entretenu, par conséquent le plus dangereux, il n’y a eu qu’un voyageur tué et 7 blessés sur 3,922,156 qui ont été transportés sur cette voie pendant la période indiquée[1]. Sur un autre chemin de fer, l’Atlantic and Great Western, dans l’année d’exploitation allant du 1er juillet 1872 au 30 juin 1873, on a transporté 957,940 voyageurs, et l’on n’a eu à constater que deux cas de mort par accident, dont un survenu par suite de l’imprudence du voyageur[2] ; aucun voyageur n’a été blessé. Il serait facile de continuer ces citations. Étant donnée d’ailleurs la longueur totale des chemins de fer américains, qui égale presque celle de tous les autres pays du globe, il ne faudrait pas s’étonner s’ils présentaient autant d’accidens à eux seuls que tous les autres chemins de fer réunis, et même un peu plus, puisqu’on voyage plus en Amérique ; encore reste-t-on au-dessous des chiffres indiqués par ce calcul. Constatons que les compagnies prennent toutes les précautions nécessaires pour sauvegarder la vie des voyageurs, et que les travaux de la voie, conduits au début en si grande hâte, sont peu à peu repris en sous-œuvre et portés au degré de solidité et de perfection voulues. C’est ainsi que le chemin de fer du Pacifique lui-même n’a pas tardé à devenir un railway de premier ordre comme l’exigeait l’acte de concession. Ce qui autorise surtout les légendes qui ont cours en Europe sur les accidens de chemins de fer en Amérique et sur le peu de cas que les compagnies exploitantes y font de la vie humaine, ce sont certaines catastrophes auxquelles la presse a donné une publicité exagérée et qui n’arrivent qu’à des intervalles très éloignés. Ainsi, sur une ligne des états de l’est, un jour d’inauguration, un pont de bois très élevé s’est écroulé dans le torrent qu’il traversait avec toute la série des invités, le président et les administrateurs de la compagnie, des sénateurs, des représentans, des reporters de journaux ; bien peu en sont revenus. De pareils accidens sont heureusement fort rares.

La liberté d’action des compagnies est loin d’être illimitée, et un contrôle existe pour défendre les intérêts du public. Dans la plupart des états atlantiques et de l’ouest, il y a un commissaire des chemins de fer nommé par la législature et le gouverneur, et

  1. Annual report of the State engineer and surveyor of the State of New-York, Albany 1874.
  2. Seventh annual report of the commissioner of the railroads and telegraphs of Ohio, Columbus 1874.