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descendans et ascendans, qui renouvelle la photosphère et alimente la radiation du soleil. La photosphère est l’appareil régulateur où s’équilibrent ces deux influences opposées : la chaleur centrale et le froid de l’espace.

Maintenant, comme les zones successives et contiguës de la photosphère sont animées de vitesses de rotation différentes, il en doit résulter, comme dans l’atmosphère terrestre, comme dans nos rivières, des mouvemens tournans, des tourbillons, qui non-seulement absorbent les nuages lumineux de la photosphère, mais qui, exerçant une sorte d’aspiration sur les couches placées au-dessus, entraînent dans leur entonnoir évasé les matériaux refroidis de la chromosphère. Voilà, selon M. Faye, l’origine des taches. L’afflux de vapeurs froides serait la cause de l’opacité du noyau ; les facules s’expliqueraient par le refoulement des courans ascendans qui donnent naissance aux nuages lumineux, et la pénombre résulterait de la condensation partielle de ces courans sur les flancs du tourbillon.

Cette explication ingénieuse des taches solaires a été développée par M. Faye avec beaucoup de sagacité ; mais le père Secchi repousse l’hypothèse des tourbillons. Pour quiconque a l’habitude de suivre les évolutions des taches, dit le célèbre astronome romain, les mouvemens tourbillonnaires sont un phénomène tout à fait exceptionnel. Sur trois cents taches et plus qu’on observe dans le cours d’une année, sept ou huit seulement présentent d’une manière bien nette la structure spiriforme qui devrait caractériser les tourbillons ; ce sont là de purs accidens qui ne sauraient servir de base à une théorie. Le plus souvent cette structure, lorsqu’on la rencontre, disparaît au bout d’un jour ou deux, tandis que les taches elles-mêmes subsistent encore longtemps après ce changement de forme. Quelquefois même le mouvement tournant, après s’être graduellement ralenti, reprend, mais en sens contraire. Tout cela prouve bien que le mouvement giratoire n’est nullement une propriété essentielle des taches.

En lisant l’ouvrage du père Secchi, on sent que l’auteur est depuis bien des années familiarisé avec les phénomènes dont il nous parle ; ses descriptions, soutenues par de nombreux dessins, sont empreintes de cette vérité que l’on rencontre dans les récits des voyageurs qui dépeignent un pays où ils ont fait un long séjour. Très certainement cette éducation de l’œil réagit sur l’esprit, elle vous fait acquérir une sorte d’instinct sûr et presque infaillible qui vous avertit immédiatement et vous fait discerner ce qui, dans une explication, est contraire à la nature des choses ; c’est cet instinct pratique qui assure à l’observateur expérimenté une certaine supériorité sur les théoriciens et donne une grande autorité à ses