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Société d’éducation et de patronage des enfans protestans insoumis » fut autorisée par le ministère de l’intérieur, en vertu d’un arrêté du 31 mars 1878. Pour recueillir les fonds indispensables à l’achat et à l’aménagement spécial d’une maison, on s’adressa à la bienfaisance protestante, qui répondit. On eut une idée ingénieuse : on fit appel aux enfans riches, en leur demandant d’être pitoyables aux enfans pauvres ; on invoqua l’exemple de Celui qui, selon saint Luc, est venu chercher et sauver ce qui était perdu. Ceux que l’on désirait associer à la bonne action ne furent point sourds ; l’émulation fut vive, et l’aumônière du pasteur reçut plus d’une petite épargne qui, sans doute, avait été destinée au pâtissier ou au marchand de jouets. Les enfans auxquels nulle gâterie n’est ménagée dans le logis de leur mère, qui, dès leur naissance, grandissent au milieu du luxe et des superfluités de la richesse, s’empressèrent à secourir la misère matérielle et morale des enfans pervertis. Cela est bien, et, s’ils y ont contracté le goût de la charité, c’est grand service qu’on leur a rendu en fécondant pour leur âme les germes de la plus belle de toutes les vertus.

On commença modestement avant de s’étendre, l’œuvre voulut faire ses preuves, qui furent promptement faites ; au bout d’une seule année, il fallut s’agrandir, car l’atelier et l’école ne suffisaient plus : vingt enfans les remplissaient ; c’est tout ce que l’on y pouvait admettre. D’autres pauvres petits frappaient à la porte ; il eût été cruel de ne point la leur ouvrir, et, en 1879, on construisit un établissement où cinquante enfans pourraient trouver asile et protection. On avait calculé que ce nombre correspondait à la moyenne de ce que les familles protestantes appartenant à la population parisienne pouvaient fournir d’enfans ayant besoin d’être traités par un système d’orthopédie morale. Ce calcul était celui de la bienfaisance, il était exagéré ; je lis dans une lettre d’un pasteur : « Si le chiffre de cinquante n’est pas atteint, c’est que les insoumis nous manquent. » On n’a pas à le déplorer.

La maison est située rue Clavel, no 7, et s’ouvre par une grille qui donne accès dans un vaste préau ; deux pavillons flanquent l’entrée et sont réservés, celui de droite aux bureaux et au logement du directeur, celui de gauche à la cuisine et au réfectoire. Deux grands arbres prouvent que l’on s’est installé sur l’emplacement d’un ancien parc. On a jeté bas des marronniers vénérables ; on les regrette aujourd’hui, car ce n’est pas le lierre que l’on fait grimper au long des murs qui les remplacera jamais. Çà et là, des instrumens de gymnastique : un portique, un tremplin, des barres transversales. Je cherche les mâts, les cordes lisses, les cordes à nœuds, les perches, les