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un véritable piège, puisqu’il suffirait de regarder comme des unités les formations sanitaires, de les constituer dans l’armée territoriale, en vertu de l’article 198, pour se donner le droit, de par l’article 146, de les faire passer dans l’armée active. Je dis que c’est un piège, car le projet de loi n’a pas osé formuler nettement ces dispositions ; il ne l’a pas osé parce qu’il pouvait craindre que cette violation du droit ne fût pas consacrée par le vote du parlement. Si les droits de tous les citoyens sont également respectés par la loi, ce qui doit être, les médecins âgés de plus de vingt-neuf ans ne pourront figurer dans l’armée active qu’avec la partie de l’armée territoriale à laquelle ils appartiennent, et l’on ne pourrait sans violer leurs droits les incorporer dans la première portion de l’armée. On fait partie de l’armée active en raison de son âge et non en raison de la profession qu’on exerce. S’il est de l’intérêt de l’armée que les médecins âgés de plus de vingt-neuf ans et appartenant à la territoriale soient appelés, en temps de guerre, à faire partie de l’armée active, il faut que la loi le dise nettement et que la bonne foi du parlement ne soit pas surprise.

Je veux montrer que l’intérêt de l’armée exige absolument cette extension de la durée du service actif. La distinction entre l’armée active et la territoriale est très facile pour ce qui concerne les unités tactiques. Une division de l’armée territoriale forme une unité distincte qui peut servir de réserve à l’armée active, couvrir une place forte, etc., en un mot avoir un rôle, sinon indépendant, du moins distinct. Pour le service médical rien de pareil. Il commence sur le champ de bataille derrière les tirailleurs, se continue par les ambulances divisionnaires et les hôpitaux de campagne, se prolonge sans interruption par les trains d’évacuation et les hôpitaux d’étapes, pour se terminer au cœur même du pays dans les hôpitaux permanens des villes placées à proximité des voies ferrées aboutissant au théâtre de la guerre. C’est un tout continu, un seul et même service, c’est une longue chaîne dont le blesse ou le malade, suivant la gravité de son état et s’il est transportable, parcourt les divers anneaux, et il n’est guère possible d’établir la limite où cessera d’agir le médecin de la territoriale, où commencera l’action du médecin de l’armée active. Il faut donc l’unification du service médical et la suppression de la distinction entre les deux ordres de contingent. D’autre part, je veux démontrer que l’équité aussi bien que l’intérêt de l’armée exigent qu’en échange de ce surcroît de charges, les médecins reçoivent des avantages sérieux tout autres que ceux qui leur sont attribués par le projet de loi.

L’armée n’a pas seulement besoin de combattans, dont le