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dont le prix est d’ordinaire de dix oiseaux payés au père de la jeune fille ; si les attraits de cette dernière justifient un accès de générosité, ils joignent à ce cadeau celui d’un collier de dents de chien ou de crocodile ; les premières sont les plus estimées. Ils ont, en outre, une passion singulière pour se peindre tout le corps ; les élégans deviennent, sans transition, rouges, bleus, verts ou jaunes, sans autre règle que leur caprice et leur désir de plaire aux belles. Ils peignent également leurs femmes, qui passent successivement, elles aussi, par toutes les couleurs de l’arc-en-ciel, offrant ainsi, dans l’unité individuelle, une inépuisable variété de tons. S’ils perdent l’un des leurs, ils se teignent en noir, eux, toute leur famille et jusqu’aux murs intérieurs de leurs maisons.

Robustes et vigoureux, nonobstant leurs jambes grêles et leur ventre proéminent, les Papouens sont laids de visages. M. d’Albertis affirme que les femmes seraient moins déplaisantes si elles laissaient plus à deviner, mais elles se tiennent pour vêtues avec une couche de peinture. Quant à leurs mœurs, il les passe sous silence, alléguant qu’il n’y a rien à dire de ce qui n’existe pas.

A peine l’Angleterre était-elle en possession de la côte sud de la Nouvelle-Guinée que l’Allemagne s’emparait officiellement de la côte nord, qu’elle baptisait Kaiser Wilhelm’s Land, de la Nouvelle-Irlande et de la Nouvelle-Bretagne, auxquelles elle donnait le nom d’archipel de Bismarck, et du groupe des îles Salomon. L’émotion fut vive en Australie de se voir ainsi gagner de vitesse. La presse coloniale prit feu et réclama vivement auprès de la métropole pour qu’elle obtint de l’Allemagne l’abandon de ces points importans. Elle représentait, et non sans raison, qu’en 1883 le pavillon anglais avait été hissé sur ces îles, par l’ordre de sir Thomas Mac Ilwraith, président du conseil australien, en vue de prévenir une occupation allemande dont on se croyait menacé ; que cette mesure avait reçu l’approbation de sir Arthur Kennedy, gouverneur de la colonie, et qu’en la désavouant sous prétexte qu’aucune puissance européenne ne songeait à occuper ces archipels, lord Derby avait laissé le champ libre à l’Allemagne et compromis la sécurité de la grande colonie anglaise. Lord Derby, interpellé peu avant dans le parlement, affirmait, en effet, avoir reçu du gouvernement allemand les assurances les plus positives qu’il ne songeait nullement à occuper ces côtes, ajoutant même qu’il considérerait comme un acte discourtois vis-à-vis de l’Angleterre tout établissement de ce genre. Et, cependant, quelques mois après le retrait du pavillon anglais, l’Allemagne hissait le sien sur ces territoires abandonnés.

Les Australiens ne s’en tenaient pas là. Ils insistaient avec force sur