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LE MOUVEMENT FINANCIER DE LA QUINZAINE

Les trois fonds français ont monté de 0 fr. 20 à 0 fr. 25 au moment de la liquidation, puis le marché a été de nouveau complètement abandonné par ses meneurs habituels, et les mêmes cours ont figuré, un jour après l’autre, sur la cote officielle. La spéculation de troisième ordre, qui seule est restée en position, a essayé de produire un peu de baisse sur l’élévation du taux de l’escompte à Londres et sur le départ du prince de Cobourg pour la Bulgarie, mais elle n’y est point parvenue, les offres ayant été largement contre-balancées par les demandes plus sérieuses des capitaux de placement au comptant.

La Banque d’Angleterre s’est décidée à élever le taux de son escompte à 3 pour 100, malgré l’abondance si manifeste de l’argent sur le marché libre monétaire, parce que le montant de sa réserve, par suite de demandes d’or pour Buenos-Ayres et New-York, était descendu à un niveau où, l’année dernière, il avait déjà fallu recourir à un taux de 4 pour 100. En fait, on pouvait redouter à Londres un drainage sévère pour les États-Unis, si la crise de circulation qui est à l’état latent dans ce pays prenait tout à coup un caractère aigu.

Le trésor fédéral, n’ayant plus de dette à rembourser au pair depuis le 1er juillet, allait enlever au marché américain une cinquantaine de millions de francs par mois sous forme d’excédent des recettes sur les dépenses. Si cet excédent restait sans emploi et ne retournait plus dans la circulation, celle-ci devenait forcément insuffisante, ne présentant aucune élasticité, et la place de New-York était menacée d’une violente perturbation dont Londres et tous les marchés du continent auraient reçu le contre-coup.

Le ministre des finances à Washington a paré le danger en se déclarant prêt à escompter à 2 pour 100 les coupons des obligations fédérales venant à échéance jusqu’au 1er janvier 1888, et à racheter avec une prime raisonnable sur le marché (soit à 110 ou 112 pour 100) des titres de la dette 4 1/2, qui ne sont remboursables au pair qu’en 1891. Ces mesures ont suffi pour calmer les appréhensions et ajourner de quelque temps au moins la crise redoutée.

L’Europe est restée très calme devant l’incident du départ du prince Ferdinand pour Sofia. Les Bourses n’ont pas bronché. On compte sur la modération de la Russie, sur l’immense besoin de la paix