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à donner lieu à des transactions plus actives que dans les dernières semaines écoulées, et le public financier s’est pris à espérer qu’une période d’animation allait s’ouvrir pour les affaires de bourse, depuis si longtemps languissantes.

Les circonstances étaient propices. Il ne subsistait plus d’appréhension sérieuse au sujet de l’état du marché monétaire. La Banque d’Angleterre n’a pas plus élevé le taux de l’escompte à 5 pour 100 au milieu et à la fin du mois qu’elle ne l’avait fait au début, et les bonnes raisons ne manquaient pas à l’appui de cette décision, en dépit des argumens répétés des journaux financiers de Londres en faveur d’une politique plus restrictive. En fait, le montant de la réserve de la Banque n’a pas subi les réductions annoncées et s’est même légèrement accru. Le drainage de l’or pour l’Amérique a cessé, par suite des achats continus de valeurs fédérales à Washington par le secrétaire du trésor. Les bilans des banques associées de New-York n’ont amené aucune aggravation de la situation sur ce marché, où, depuis plusieurs mois, une crise violente était attendue.

On peut considérer cette crise, sinon comme entièrement conjurée désormais, du moins comme ajournée. Le trésor américain dispose encore de ressources abondantes provenant des excédens budgétaires, et il s’est déclaré prêt à les employer en achats de bonds 4 1/2 et 4 pour 100 à des prix très satisfaisans pour une fraction importante des détenteurs de ces titres. Voilà pour le présent. Dans quelques mois, le congrès aura à parer aux dangers de l’avenir et à statuer sur l’application des mesures les plus propres à empêcher, dans les caisses du trésor, une accumulation d’excédens budgétaires susceptible de produire une contraction dangereuse de la circulation métallique aux États-Unis.

La politique adoptée sur le terrain des questions monétaires par le gouvernement américain a produit ainsi le résultat espéré. Elle a calmé les appréhensions du marché de New-York et rassuré par contre-coup celui de Londres. Les directeurs de la Banque d’Angleterre se trouvent justifiés par l’événement de n’avoir point agi, sous le coup d’une panique éventuelle, comme si la crise redoutée avait déjà éclaté.

La spéculation parisienne a profité habilement de l’accalmie qui se produisait sur le terrain monétaire, et elle ne s’est pas émue davantage des intentions attribuées au cabinet Rouvier relativement à l’émission d’un grand emprunt de liquidation. Il serait prématuré de dire que l’idée d’un emprunt de ce genre, s’élevant à près de 1 milliard, soit complètement abandonnée. On peut croire cependant que le ministre des finances ne soulèvera pas la question à propos de la discussion du budget de 1888. Il a déclaré, il y a peu de jours, à la commission financière de la chambre, qu’il séparerait de la discussion de