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refroidissement, on ne laissa entrer dans l’appareil que de l’air filtré sur des tampons de coton enduits de glycérine, de façon à retenir tous les germes que l’air pouvait entraîner ; les terres furent enfin abandonnées à elles-mêmes, pendant un temps prolongé ; on ne put y déceler la moindre fixation d’azote.

Visiblement, quand on porte une terre à 100 degrés, on ne change rien à sa composition, à sa nature physique, mais on tue les micro-organismes qu’elle renferme, et, puisque les terres normales fixent l’azote, mais qu’elles perdent cette propriété aussitôt qu’elles ont été portées à 100 degrés, il faut en conclure que ce sont ces micro-organismes qui sont l’agent de cette fixation.

Les terres mises d’abord en expériences étaient très pauvres en carbone et en azote, elles ne représentaient pas des sols cultivables avantageusement, et il était intéressant de chercher si la fixation de l’azote par action microbienne pouvait se produire encore dans des sols déjà enrichis de matières organiques par des végétations antérieures. C’est ce que fit avec succès M. Berthelot, pendant l’année 1886, pour des sols nus ou couverts de végétaux, notamment d’amarante. Est-ce à dire que toutes les terres soient capables de fixer l’azote atmosphérique, et qu’une terre, dans laquelle cette fixation se produit dans certaines conditions, s’enrichira d’azote si ces conditions sont changées ? Non ; M. Berthelot s’est efforcé de préciser ces conditions l’année même où sa découverte était vivement attaquée par M. Schlœsing.

On sait que l’éminent directeur de l’École d’application de l’administration des tabacs est un des expérimentateurs les plus habiles de ce temps ; il a doté la science agricole de méthodes analytiques excellentes, d’instrumens qui conduisent à exécuter les recherches avec plus de précision et de facilité qu’on ne le faisait naguère. Or, M. Schlœsing reprit les expériences de M. Berthelot en opérant par une autre méthode. Au lieu de chercher la quantité d’azote engagée en combinaison dans la terre arable au commencement et à la fin des observations, il met ces terres en expériences dans un volume d’air soigneusement mesuré et cherche si, après que cet air est resté pendant six mois par exemple avec la terre, une fraction plus ou moins forte d’azote quitte l’état aériforme pour s’engager dans une combinaison solide ; or, dans aucune des expériences qu’il a exécutées en 1887, cette disparition d’azote gazeux n’a pu être constatée.

Toutes les incertitudes reparaissaient. La querelle qui avait séparé pendant de longues années MM. Boussingault et George Ville se ranimait entre MM. Berthelot et Schlœsing.

MM. A. Gautier et Drouin exécutaient bien, en 1888, une série