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la Belgique pour ne pas redouter tout ce qui pourrait refroidir ses rapports avec le Saint-Siège. En retour, il me parla avec confiance du rétablissement de la paix avec l’Allemagne. « C’est une affaire de temps, me dit le Souverain Pontife, mais de tous côtés il me semble que l’on désire ; un arrangement, et, quant à moi, je le désire vivement, dans l’intérêt de ce pays, que j’aime, comme dans celui de l’Église. »

Je rappelai ensuite au Saint-Père la demande que j’avais adressée depuis mon retour au nouveau secrétaire d’État de faire respecter le protectorat que le Congrès de Berlin nous avait reconnu sur les catholiques d’Orient et de ne pas permettre que d’autres puissances cherchassent à le partager avec nous. C’était à la demande du Saint-Siège et du Saint-Père personnellement que ce droit avait été reconnu à la France par un traité formel. C’était à la cour de Rome à sauvegarder l’exécution pratique d’un article qui avait été obtenu par notre intermédiaire et auquel nous avions, par suite, le droit de nous intéresser davantage.

Le Pape voulut reconnaître la justesse de ces observations et me dit qu’il en parlerait au secrétaire d’État et au cardinal préfet de la Propagande. Je vis, du reste, avec plaisir, que Sa Sainteté était informée des moindres détails, et qu’elle suivait avec la plus vigilante sollicitude toutes les questions de politique étrangère auxquelles se trouvaient mêlés les intérêts de l’Église.

Tels sont les principaux points qui furent traités dans cette audience, dont j’ai pu oublier alors et dont j’omets encore aujourd’hui quelques détails, dans un compte rendu destiné à la publicité, mais c’est toujours la pensée et ce sont souvent les expressions mêmes du Souverain Pontife qui y ont été reproduites. « Je regrette seulement, ajoutais-je, de ne pouvoir y joindre l’expression de bonté et presque de paternité bienveillante qui s’est peinte à diverses reprises sur son visage, notamment lorsqu’il me parlait de la France, ni retracer la finesse et la distinction de celle physionomie qui appartient déjà à l’histoire et y laissera, je crois pouvoir l’affirmer aujourd’hui, si le temps ne lui manque pas, une trace lumineuse et souverainement bienfaisante. »

J’eus l’occasion, quelques jours, après de recevoir la visite du cardinal Simeoni, préfet de la Propagande, qui vint m’annoncer que, sur l’ordre du Pape, il venait d’adresser à tous les délégués