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l’accomplissement d’un devoir tenu pour sacré par toutes les nations civilisées est contraire aux lois naturelles ; et, quant au droit des gens, si l’on ne trouve pas l’interdiction formelle d’un pareil abus dans le règlement élaboré par la Conférence de la Paix, concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre, il ne faut pas oublier que la Convention arrêtée à La Haye porte expressément : « Il n’a pas été possible de concerter dès maintenant des stipulations s’étendant à toutes les circonstances qui se présentent dans la pratique. D’autre part, il ne pouvait entrer dans les intentions des Hautes Parties contractantes que les cas prévus fussent, faute de stipulation écrite, laissés à l’appréciation arbitraire de ceux qui dirigent les armées. En attendant qu’un code plus complet des lois de la guerre puisse être édicté, les Hautes Parties contractantes jugent opportun de constater que, dans les cas non compris dans les dispositions réglementaires adoptées par elles, les populations et les belligérans restent sous la sauvegarde et sous l’empire des principes du droit des gens, tels qu’ils résultent des usages établis entre nations civilisées, des lois de l’humanité et des exigences de la conscience publique[1]. »


VII

Nous nous sommes bornés à noter et à analyser les faits, puis à chercher le rapport entre ces faits dans leur réalité et les assertions des généraux anglais, entre ces faits dans leur brutalité et les règles du droit des gens. Nous l’avons fait en nous abstenant scrupuleusement de critiquer la manière dont cette guerre affreuse est conduite et en nous renfermant dans les limites de l’examen du droit de conquête, comparé aux proclamations anglaises d’annexion.

Mais je ne puis m’empêcher de me demander : depuis plus d’un an, les deux Républiques ont été déclarées annexées par une simple proclamation ; le gouvernement et la presse britanniques, — sauf quelques exceptions louables, — s’évertuent à répéter depuis des mois que la guerre est finie ; tout le monde pourtant sait bien que la guerre continue ; qu’elle continue d’une manière presque sans précédent ; où se tient donc maintenant

  1. Actes de la Conférence internationale de la Paix, 1899, 1re partie, p. 239.