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V

Tous les faits et les considérations qui précèdent sont relatifs aux cellules isolées, aux êtres monocellulaires. Mais, — et c’est là ce qui fait le grand intérêt de ces vérités, — elles peuvent s’étendre à toutes les cellules vivant en collectivité, c’est-à-dire à tous les animaux, à tous les êtres vivans que nous connaissons. Dans l’édifice compliqué de l’organisme, les élémens anatomiques, les moins différenciés tout au moins, auraient un brevet conditionnel d’immortalité. L’œuf, les élémens sexuels, en général ; peut-être encore les globules blancs du sang, les leucocytes, seraient dans ce cas. Encore faudrait-il qu’autour de chacun de ces élémens fût réalisé le milieu invariablement parfait qui en est la condition nécessaire. Ce n’est pas ce qui a lieu. — Quant aux autres élémens, ils sont dans la condition des infusoires, mais sans la ressource de la conjugaison. Le milieu ambiant s’épuise ou s’intoxique autour de chaque cellule par suite des accidens qui frappent les autres. Chacune subit donc une déchéance progressive et finalement une destruction qui, en principe, sont peut-être accidentelles, mais qui, en fait, sont la règle.

On remarquera que cette mort accidentelle des élémens anatomiques et des protozoaires n’est pas instantanée : elle a une préparation, un développement, une histoire. Cette phase intermédiaire entre la vie parfaite et la mort avérée peut être longue ou courte. — Lorsqu’elle est longue, c’est-à-dire lorsque la mort survient lentement, par suite de l’accumulation progressive de très petites perturbations insensibles, cette déchéance traînante constitue le vieillissement, la sénescence. Elle se manifeste, en général, par l’atrophie, qui réduit la taille et les dimensions de l’élément, et par des modifications chimiques, dégénérescence graisseuse, calcification, destruction granuleuse, qui en altèrent la substance. — Lorsque au contraire la mort est le résultat d’une action plus brutale, la période intermédiaire se trouve écourtée. On ne peut assimiler cette phase morbide et survenue prématurément à la déchéance sénile vraie : on l’appelle la nécrobiose. Les causes en sont étrangères à la matière vivante. Elles sont d’origine externe. C’est l’insuffisance des matériaux alimentaires, de l’eau, de l’oxygène ; c’est la présence, dans le milieu, de