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en face de Löwenberg, ayant rejeté les Français de Lauriston sur la rive gauche du Bober.

Enfin, le corps de Langeron, qui formait la gauche de l’armée de Silésie, subit des épreuves plus rudes. Son avant-garde, commandée par Rudzewitsch, avait franchi le Bober à Siebeneichen dans la matinée du 19, enlevé dans un coup de main heureux les bagages et la chancellerie du corps de Macdonald. Mais, repoussé bientôt après, Rudzewitsch eut quelque peine à repasser le Bober. Il ne fut sauvé que par un hasard heureux qui lui permit de trouver un gué au moment opportun, et par l’arrivée tardive du gros du corps de Langeron qui protégea sa retraite. Le 19 au soir, le corps de Langeron s’était reformé en arrière du Bober sur la rive droite, à Zobten, où il demeura le 20. Il avait perdu plus de 1 500 hommes.

Ainsi, l’offensive audacieuse de Blücher avait, trois jours après la rupture de l’armistice, porté son armée sur le Bober, gagné plus de 25 lieues de terrain. Le 20, il occupait toute la ligne du Bober, le corps de Sacken à Bunzlau, le corps de York en face de Löwenberg, le corps de Langeron à Zobten, ayant partout le contact des Français retirés sur la rive gauche. Mais déjà, dans cette marche hardie, et marquée de combats acharnés, les premières difficultés avaient commencé à poindre.

Le 19, le corps de Ney, n’ayant point battu en retraite de la même allure que les autres corps français, était demeuré en pointe en avant du Bober, au Gräditzberg, en face du centre de l’armée de Silésie. Blücher, ayant constaté la situation aventurée du corps de Ney, envoya, dans la soirée du 19, l’ordre aux corps d’armée de ses deux ailes, — au corps de Sacken et au corps de Langeron, — de se rabattre, le 20, dès le point du jour, sur le corps de Ney pour l’écraser. Cet ordre eût-il été exécuté, qu’on n’en pouvait rien attendre, car Ney repassa le Bober dans la nuit du 19 au 20. Mais aucun des deux généraux russes ne se conforma aux ordres du quartier général. Leurs troupes avaient soutenu, durant la journée du 19, des combats meurtriers dont les pertes équivalaient à celles d’une bataille. Sacken fit des représentations sur les inconvéniens et l’inutilité des opérations qu’on lui prescrivait. Quant à Langeron, il se refusa explicitement, malgré des instances répétées, à suivre les instructions de Blücher. Il avait eu une journée difficile, où il avait le sentiment d’avoir couru quelques risques. Il