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fonctionnement des institutions locales, le budget des revenus et des dépenses sera dressé dans chaque vilayet, et les perceptions provinciales contrôlées par la Banque ottomane seront destinées en premier lieu aux besoins de l’administration locale. Le paiement des services, civil et militaire, y compris le mode de perception des dîmes, sera modifié et l’affermage en gros sera aboli. » Il y a là le germe d’excellentes choses, mais seulement le germe, et la note des deux puissances procède trop souvent par sous-entendus. C’est peut-être réduire à l’excès le rôle de la Banque ottomane que de lui donner un simple pouvoir de contrôle, et ce n’est pas assez dire du mode de perception des dîmes que d’annoncer qu’il sera modifié. Toutefois si, par un moyen quelconque, on assure réellement le paiement régulier des fonctionnaires de l’ordre civil et militaire, on aura fait plus qu’une réforme, on aura fait une révolution et la plus salutaire de toutes. Nous avons déjà dit que le fonctionnaire ottoman, y compris le gendarme, n’était concussionnaire et pillard que parce qu’il n’était pas payé : le jour où il le sera, beaucoup de choses pourront changer. Mais comment le paiement exact et régulier sera-t-il assuré, et par quoi l’affermage en gros, qui doit être aboli, sera-t-il remplacé ? La note ne le dit pas, et il importerait beaucoup de le savoir pour se rendre compte de la sincérité et de l’efficacité des réformes. Enfin, il y a aura une amnistie générale dans les trois vilayets, ce qui contribuera sans doute à l’apaisement des esprits ; mais c’est là une liquidation du passé, et il s’agit surtout de préparer et d’assurer un meilleur avenir.

Tel est le programme : tout ce qu’il contient est excellent, mais il ne contient peut-être pas tout ce qu’il faudrait. Il est vrai que, s’il est appliqué sincèrement, on n’échappera pas, quand on voudra le préciser, à la nécessité de le développer. Reste à savoir s’il sera considéré comme une satisfaction suffisante pour que les comités révolutionnaires désarment ou soient désarmés par le sentiment favorable et confiant des populations. C’est la confiance qui sera difficile à obtenir. On a déjà éprouvé de si grandes et de si nombreuses déceptions l’on est si habitué à des promesses ottomanes qui ne sont jamais suivies d’effet ! tant de réformes ont été annoncées et si peu ont été réalisées ! Bien que réduit à un minimum, le programme austro-hongrois ferait beaucoup de bien si on pouvait dire de lui, comme autrefois de la Charte, qu’il sera une vérité : il faudra pour cela que les puissances tiennent la main à son exacte application. Il n’y a, dans la note austro-russe, aucun contrôle européen organisé, ni même prévu :