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du gouvernement acquièrent une plus-value par le fait que le nombre en est désormais limité et que, par conséquent, selon la loi de la demande et de l’offre, cette dernière n’étant plus susceptible d’être augmentée, la première devra amener une hausse. C’est ce qui a permis au gouvernement britannique d’assigner à la roupie une valeur de 16 pence, notablement supérieure au pair intrinsèque, et de la maintenir d’une façon stable, malgré la baisse continue de l’argent.

De tous les pays qui sont dans le cas que nous examinons, celui qui nous touche le plus et nous préoccupe d’une façon particulière est notre empire d’Extrême-Orient, où l’argent règne en maître et où la circulation se compose en partie de dollars frappés par nos soins à raison de 27 grammes de poids et à 900 millièmes de fin, en partie de piastres mexicaines qui pèsent 27gr,073 au titre de 903 millièmes environ. L’une et l’autre de ces deux monnaies, librement frappées jusqu’ici, n’ont cessé de baisser, suivant, comme il est naturel, les fluctuations du métal blanc. Point n’est besoin d’insister sur les inconvéniens de cet état de choses ; le commerce extérieur de notre colonie ne repose plus sur une base solide : lorsqu’un négociant de Saigon ou de Hanoï fait venir d’Europe des marchandises, dont il connaît le cours en francs, il ignore combien de piastres il devra débourser à l’époque du règlement, parce que le prix de la piastre varie chaque jour et que, par conséquent, pour acquitter une même dette en francs, il lui faudra tantôt un plus grand, tantôt un plus petit nombre de piastres d’argent. L’exportateur qui envoie des marchandises au dehors n’est pas davantage à l’abri de cet aléa, à moins de vendre immédiatement, lors de la conclusion d’une affaire, le produit de sa marchandise à une échéance déterminée, méthode impraticable dans la plupart des cas, et qui d’ailleurs ne supprimerait pas les inconvéniens des fluctuations de la piastre pour les transactions intérieures de l’Indo-Chine.

Il ne faut pas croire qu’une diminution de valeur de la monnaie d’argent par rapport aux monnaies d’or et aux monnaies étrangères en général n’ait pas de répercussion à l’intérieur du pays. Les inconvéniens de cette baisse ne se bornent pas au commerce extérieur ; ils sont également perceptibles à l’intérieur des frontières ; sans parler de l’effet instantané sur le prix des marchandises venues du dehors et qui renchérissent au fur