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LE DUC DE BOURGOGNE
EN FLANDRE

II[1]
LA PERTE DE LILLE


I

La Cour prolongea son séjour à Fontainebleau jusqu’au 27 août. C’était plus tard que de coutume, mais il n’y avait pas moyen d’arracher Monseigneur à ce séjour qu’il aimait, la proximité de la forêt lui donnant toute facilité pour satisfaire sa passion dominante : la chasse à courre. La gravité des événemens ne parvenait pas à le tirer de son épaisse quiétude. Un jour qu’il rentrait de la chasse, et qu’il se plaisait à énumérer devant sa sœur, la princesse de Conti, tous les carrefours, toutes les routes, tous les sentiers de la forêt par lesquels il avait passé : « Mon Dieu ! Monseigneur, s’écria-t-elle, la merveilleuse mémoire que vous avez là ! C’est bien dommage qu’elle ne soit chargée que de pareilles choses[2]. » Sa petite cour continuait d’être le centre des ennemis du Duc de Bourgogne, et la complaisance avec laquelle il les écoutait était un encouragement pour les partisans de Vendôme. Ceux-ci avaient pris cependant le parti de se taire quelque temps, intimidés par le mécontentement que le Roi avait formellement exprimé lorsqu’il avait connu les lettres d’Alberoni et du comte d’Évreux[3], mais la

  1. Voyez la Revue du 1er avril.
  2. Saint-Simon. Édition Boislisle, t. XVI, p. 328.
  3. Voyez la Revue du 1er juillet 1902.