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La branche maîtresse de cette industrie est, aujourd’hui comme il y a un siècle, l’industrie de la soude, qui a pour tributaires la verrerie, la céramique, la savonnerie, la photographie, la fabrication des boissons gazeuses, des sels métalliques, des produits organiques tels que les colorans artificiels, la pharmacie, l’industrie des celluloses, celle du papier, etc.

La fabrication de la soude naturelle (carbonate de soude naturel) par l’incinération des goémons et surtout des plantes sodifères dont la culture, sur les bords de la Méditerranée, avait autrefois une grande importance, n’est plus qu’un souvenir : elle a été tuée par le procédé Leblanc, que le procédé Solvay est en train de tuer à son tour.

Dans le procédé Leblanc, qui date de 1792, la matière première employée est le chlorure de sodium (sol marin), et le principal agent de transformation, l’acide sulfurique. Cet acide, en agissant au rouge sur le chlorure, sépare le chlore du sodium : le chlore donne alors de l’acide chlorhydrique et le sodium du sulfate de soude. En traitant, à une température peu élevée, par le bioxyde de manganèse, l’acide chlorhydrique, cet acide abandonne environ la moitié de son chlore, qu’on peut recueillir et utiliser, le résidu de l’opération, le chlorure de manganèse, corps inutilisable, gardant malheureusement l’autre moitié. Quant au sulfate de soude, traité au rouge par un mélange de carbonate de chaux et de charbon, il se transforme en carbonate de soude avec production d’un résidu encombrant, dangereux et difficilement utilisable, qui est du sulfure de calcium.

Il y a un siècle, ce procédé de fabrication était parfait : le combustible abondait, le bioxyde de manganèse aussi, et la perte d’une moitié du chlore n’avait pas grande importance. Mais, avec le temps, le charbon est devenu plus rare et, par conséquent, plus cher : or, dans le procédé Leblanc, il y a véritablement gaspillage de combustible, car c’est à la flamme de la houille qu’on chauffe les fours à sulfate de soude et à carbonate de soude ; de plus, on vient de le voir, il faut ajouter du charbon au carbonate de chaux pour faire passer le sulfate de soude à l’état de carbonate. Avec le temps, aussi, le prix du bioxyde de manganèse est devenu inabordable, par suite de l’emploi de ce corps dans la métallurgie de l’acier. Quant au chlore, enfin, il devient de plus en plus indispensable.

Un changement radical dans la fabrication de la soude était