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France, duc d’Anjou, second fils du Dauphin et petit-fils de Louis XIV. Ce prince fut proclamé roi à Madrid le 24 novembre suivant.

En présence de l’attitude hostile prise aussitôt par l’Empereur, auquel il paraissait certain que l’Angleterre et la Hollande prêteraient leur concours, la France et l’Espagne conclurent avec le Portugal une alliance qui avait pour effet de priver les flottes ennemies de tout port de ravitaillement ou de refuge sur la longue étendue de côtes comprise entre les Pays-Bas et l’Italie.

Il fallait aussi pourvoir à la sûreté des colonies espagnoles du Nouveau-Monde, grandement négligées par l’Espagne, et, dès le mois d’avril 1701, le marquis de Coëtlogon, lieutenant général des armées navales, était chargé d’escorter un convoi d’armes et de munitions envoyé par la France en Amérique. Coëtlogon embarquait en même temps sur son escadre des ingénieurs et des officiers d’infanterie destinés à concourir à la défense des ports de Carthagène, Porto-Bello, la Vera-Cruz et la Havane. Ses instructions lui prescrivaient également de mettre à l’abri de tout coup de main les établissemens français de Saint-Domingue, préservés d’ailleurs dans une certaine mesure par le seul fait de leur moindre importance.

L’état déplorable où se trouvaient alors les flottes du Portugal et de l’Espagne les rendait incapables de protéger la péninsule ibérique, et moins encore les places maritimes que le Roi Catholique possédait en Italie, si la France ne leur adjoignait une puissante armée navale.

Tandis que le comte d’Estrées, fils du maréchal, quittait Toulon avec une forte escadre pour gagner Cadix, où le rejoignaient les galères du bailli de Noailles, le comte de Château-Renault rassemblait à Brest une autre flotte, dont la destination demeurait incertaine et restait subordonnée à la connaissance qu’on pourrait avoir des projets de l’Angleterre. On savait seulement alors que cette puissance, sans nous avoir déclaré la guerre, armait cependant de son côté.

Récemment pourvu de la charge de vice-amiral, rendue vacante par la mort de Tourville, Château-Renault, qui venait de dépasser la soixantaine, se trouvait tout désigné pour un haut commandement, tant par l’ancienneté de ses services que par leur éclat. Il avait porté fort heureusement secours à l’Irlande, lors des tentatives faites par Jacques II pour reconquérir son trône,