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« Pendant cette marche, à tout moment pensait-on recevoir une volée d’obus et de mitraille, ou du moins trouver le chemin barré par des troncs d’arbres qu’il eût suffi de faire rouler du haut de la montagne jusqu’au fond du ravin. Tous les chefs avaient le regard soucieux, car leurs soldats, avec l’artillerie et les bagages, s’allongeaient sur une étendue de plusieurs lieues en une ligne interminable, et non seulement il fallait un temps très long pour rassembler et déployer un corps d’armée ou même une division sur un terrain si abrupt ; mais la retraite par ces routes étroites et encombrées devenait presque impossible : elle s’y fût très promptement changée en déroute, en désastre. » Mais, ni à gauche, ni à droite, les corps prussiens ne rencontrent personne, et n’ont pas même à écarter un tronc d’arbre du pied de leurs soldats. Le 1er corps franchit le défilé à Parschnitz, réunit ses deux colonnes, et, en avant vers Trautenau, rencontre, à 8 heures du matin, une des brigades de Gablentz. Gablentz arrive au secours avec deux autres brigades, reste victorieux à Trautenau, et rejette Bonin en désordre dans les défilés, mais ses pertes sont doubles de celles des Prussiens. Le même jour, Ramming est battu à Nachod par Steinmetz.

Le lendemain, le victorieux de la veille, Gablentz, devient à son tour vaincu et à la défaite de Nachod s’en ajoute une nouvelle, celle de Skalitz En même temps le prince Frédéric-Charles passait l’Iser, battait Clam-Gallas et le prince de Saxe à Gilschin, tandis que le Prince royal s’avançait jusque sur l’Elbe et établissait son quartier général à Königinhof.

Le 29 au soir, le Prince royal sur l’Elbe et le prince Frédéric-Charles à Gitschin menacent de tous côtés l’armée autrichienne. Benedek avait pris le contre-pied de la stratégie de Bonaparte, qu’il s’était proposé d’imiter. Il s’était arrangé pour être le plus faible partout. D’une offensive chimérique, il se jeta dans une défensive effarée ; le 30, à 3 heures, il décampe de Dubnetz, Forme cinq colonnes et les dirige sur Königgrätz où il arrive lui-même dans la nuit du 30 juin au 1er juillet. Plus de cinq corps d’armée avaient été engagés dans ces combats décousus. Leurs pertes étaient, dans des proportions énormes, supérieures à celles des Prussiens : 30 000 hommes, sans compter les malades, les traînards, et les survivans découragés, terrifiés, sans confiance et sans forces. Le 30, la communication était rétablie entre