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personnelle dans son gouvernement, mais il n’a pas de pouvoirs propres qu’il exerce directement. Or, il n’était accompagné d’aucun de ses ministres ; lord Lansdowne était resté à Londres. Le Roi, en somme, faisait après son couronnement des visites de courtoisie aux diverses puissances, et il ne les a pas encore terminées : nous avons été de la première série. En arrivant à Paris, il venait de Rome ; il ira bientôt dans d’autres capitales. L’Angleterre, quoique sa dignité ne lui ait pas permis d’en convenir, a souffert dans ces derniers temps de l’isolement moral où elle s’est sentie. Elle sait gré à son roi de renouer pour elle de bonnes relations avec le continent. Le Roi rompt la glace qui s’était formée. Il tend à tout le monde une main cordiale qui est acceptée cordialement. Partout où il passe, l’horizon politique s’éclaircit. Ces voyages ne sont pas inutiles, puisqu’ils servent à liquider ce qu’il a pu y avoir de pénible dans le passé et à préparer ce qu’il peut y avoir de favorable dans l’avenir.

Au reste, on a fait beaucoup de voyages depuis quelques semaines. Nous avons déjà rendu compte de celui de M. le Président de la République en Algérie et en Tunisie. M. Chaumié, notre ministre de l’Instruction publique, en a fait un autre à Rome, à Athènes, et même à Constantinople : il a pu voir partout des établissemens français florissans. On l’a particulièrement bien reçu à Rome. Il y a eu, en vérité, de la part du gouvernement italien, du Roi, de la Reine, des ministres, un empressement qui indiquait à notre égard les intentions les plus affectueuses. M. Chaumié a éprouvé une impression très vive de tout ce qu’il voyait et entendait, et, comme il a la parole éloquente et facile, il a prononcé des discours où la joie débordait. Il a été, en cela, l’interprète des sentimens de la France, toujours heureuse de retrouver des amis dans ses voisins, qu’il s’agisse des Anglais ou des Italiens. Ces derniers pratiquent avec raison le même éclectisme : pendant quelques jours, ils ont vécu dans un enthousiasme ininterrompu qui s’est porté, tantôt sur le roi Edouard VII, tantôt sur Guillaume II, et qui n’a pas négligé M. Chaumié. Tout s’est passé admirablement à Rome, pour tout le monde. Néanmoins, de tous ces voyages, le plus intéressant est celui de l’empereur Guillaume II. L’Empereur a reçu un accueil éclatant. Les Romains sont volontiers démonstratifs : ils l’ont été dans cette circonstance comme s’ils étaient poussés par un élan irrésistible. Guillaume a dû être satisfait des sentimens qui faisaient explosion autour de lui : la vérité oblige à-dire que, lorsqu’il a été parti, il n’a peut-être pas laissé les Italiens aussi contens de lui qu’il l’avait été d’eux. Est-ce bien le roi