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La première question qui se pose est celle des hôtels. Non pas qu’en France il n’y en ait d’excellens ; mais l’hôtel à la fois propre, confortable, et d’un prix abordable y reste encore beaucoup trop rare. Les hôtels français peuvent en effet se ramener à trois types : l’hôtel de grand luxe, l’hôtel ordinaire, et l’auberge. Le premier, généralement très cher, répond aux besoins et aux goûts de sa clientèle. Situé d’ailleurs uniquement dans les grandes villes ou les stations balnéaires et thermales à la mode, il répond pleinement à sa fonction ; il n’a pas à changer et ne changera pas. Il en est de même, à l’autre bout de l’échelle, des auberges qui, dans les villes, abritent une clientèle d’ouvriers et de paysans. Mais telle n’est pas la situation de l’hôtel ordinaire, dans les villes moyennes ou petites, et de l’auberge dans les bourgs et les villages. C’est là qu’il faut faire, si l’on veut exploiter le tourisme en France, des réformes radicales.

Le fond de la clientèle des hôtels ordinaires en France est constitué par les voyageurs de commerce. Les nécessités de leur profession dictent leurs besoins. Ce qu’ils demandent surtout à un hôtel, c’est d’être central, pour être plus à portée de leurs acheteurs ; d’avoir des propriétaires et un personnel accueillans, auprès desquels ils se renseigneront au besoin ; enfin, de leur donner, pour un prix modique, une table d’hôte abondante et, si possible, délicate, où ils pourront se retrouver et s’informer entre confrères. Peu exigeans en général pour la chambre, ils ne le sont pas du tout pour l’entretien et le service.

Tout autres sont les désirs du touriste. Il recherchera, au contraire, un hôtel paisible et, par conséquent, éloigné du centre des affaires ; il ne demandera des propriétaires et du personnel qu’une correction courtoise sans familiarité ; il préférera, s’il voyage en famille ou à plusieurs, une table séparée simplement servie à la table d’hôte banale ; il voudra un salon décent pour y recevoir une visite, le cas échéant ; il sera surtout exigeant pour la propreté méticuleuse non seulement de sa chambre, mais des pièces communes de l’hôtel, des escaliers, des corridors, et surtout, oh ! surtout, des lavabos et water-closets ; il tiendra à ce que le service soit irréprochable. Toutes les fois qu’on le pourra, il faudra donc prendre son parti entre la clientèle ordinaire des hôtels et la clientèle des touristes, savoir que Tune exclut généralement l’autre, et choisir entre les deux.

Mais cela n’est pas toujours possible, dans les hôtels de