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situation menace de s« prolonger lorsque quelques Sikhs quittent la tranchée en déclarant qu’ils vont à la recherche de renforts et que d’autres, à la vue de leurs camarades tombés à leurs côtés, montrent, à ce même moment, plus de souci à s’abriter derrière l’épaulement de la tranchée qu’à se découvrir pour continuer le feu, malgré les exhortations des officiers anglais qui les commandaient et dont l’attitude, — comme celle des détachemens français et japonais, — fut héroïque en toute cette circonstance.

La conduite des Sikhs dans cet épisode, certainement le plus meurtrier de la campagne, fut très sévèrement commentée : elle devint aussitôt le point de départ d’une défaveur marquée à l’égard de toutes les troupes hindoues, défaveur qui persista jusqu’après les opérations de la campagne, non point parmi ceux des alliés qui virent ces soldats à l’œuvre et qui eurent ainsi l’occasion de les estimer à leur juste valeur, mais dans les appréciations des reporters. On ne manqua point, en outre, ainsi que cela se produit toujours en pareille occurrence, d’attribuer aux Sikhs nombre de défaillances et de méfaits de tout genre dont il a été aisé à leurs chefs de faire justice[1].

On rapporta notamment que, le 5 août 1900, au combat de Peitzang, les officiers anglais qui commandaient, sur la rive droite du Peï-ho, un détachement des Sikhs, en première ligne, voulant profiter de l’exemple donné par le magnifique élan des colonnes japonaises s’élançant à l’assaut des retranchemens chinois, tentèrent vainement aux cris de « Ahead ! Ahead ! — En avant ! En avant ! » d’entraîner ces Sikhs à leur suite, en se joignant à un bataillon allemand accouru pour renforcer les Japonais et qui chargea l’ennemi avec ce dernier. Or, les Japonais sont les seules troupes qui aient été réellement engagées à fond et en forces dans ce combat de Peitzang contre les retranchemens construits par les Chinois sur la rive droite du Peï-ho : les généraux commandant les corps anglais et américains qui

  1. Les troupes anglaises, on l’a vu, et leurs corps indigènes étaient suivis d’une véritable année de coolies hindous. On peut dire, à la décharge de ces corps, que presque tous les méfaits que l’on mettait sur le compte des Sikhs, Bengalis, etc., étaient uniquement imputables à ces coolies avec lesquels ces soldats étaient confondus. C’est ainsi que les Hindous, que l’on rencontrait comme traînards ou comme maraudeurs un peu partout et ceux qui, à Pékin et à Tien-Tsin, tenaient, en pleine rue, boutique d’objets pillés, appartenaient pour la presque-totalité à la catégorie de ces coolies qui marchaient avec le contingent anglais.