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sûre d’elle-même, pour se germaniser, d’abord, et puis pour aider, par son exemple et par son action, à la purification de l’Eglise universelle.

Ainsi nationalisée, elle pourrait, en quelque mesure, calquer sa constitution sur la constitution même de la société allemande ; elle donnerait dans ses conseils une place privilégiée aux membres de l’aristocratie, et leur assurerait ainsi, dans la vie religieuse, cette même préséance que les vicissitudes politiques commençaient à leur rendre dans la vie civile. Dans l’Eglise germanique telle que la voulait le baron de Wessenberg, il n’y avait plus place, ou presque plus, pour la hiérarchie romaine ; mais il y avait place pour la hiérarchie mondaine ; les grands de ce monde fussent devenus, constitutionnellement, les grands de l’Eglise ; et, la réaction politique aidant, l’on eût vu ce projet de réforme, qui arborait comme idéal la résurrection de la primitive communauté chrétienne, s’égarer en des voies singulièrement diverses de celles où un pareil rêve avait, deux siècles plus tôt, engagé la démocratie puritaine, et aboutir, tout au contraire, à l’asservissement de l’Eglise par une oligarchie aristocratique.

Wessenberg, au Congrès de Vienne, eut deux catégories d’adversaires : d’une part, deux chanoines de Worms et de Spire et un avocat de Mannheim, qui s’intitulaient « les orateurs de l’Eglise catholique d’Allemagne, » et qui prenaient conseil près du cardinal Consalvi et du nonce Severoli ; d’autre part, les représentai de la Bavière et de plusieurs autres souverainetés, qui continuaient d’estimer que chaque État devait s’entendre avec Rome, personnellement.

Les « orateurs » demandaient la « liberté » de l’Église allemande ; mais c’est contre l’hégémonie des couronnes laïques, non contre celle de la tiare, qu’ils s’insurgeaient. Que le Pape pourvût, tout de suite, aux nombreuses vacances des sièges épiscopaux ; que les chapitres, ensuite, recouvrassent tous leurs droits pour l’élection des évêques ; et que les États cessassent de s’ingérer en pareilles affaires : tel était leur programme. Ils avaient un moyen décisif pour assurer l’indépendance des évêchés et des chapitres à l’endroit du pouvoir civil : c’était le rétablissement de l’Église dans celles de ses propriétés qui n’étaient pas encore aliénées et, en cas d’aliénation antérieure, le versement immédiat, par les puissances laïques, d’indemnités convenables. Personne à Vienne ne se ralliait à ces solutions, et Metternich