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ce n’est pas une des tâches les moins remarquables qu’elle ait accomplies dans les mers asiatiques.

Débarrassé complètement des Wahabites et, en partie, des pirates, Seyd-Saïd s’occupa d’augmenter ses forces et d’accroître ses États. Il se construisit une flotte qui compta jusqu’à 30 frégates, dont plusieurs armées de 50 canons, et qui fut la plus puissante de l’océan Indien. Grâce à elle, il s’assura l’empire du golfe Persique et d’immenses territoires en Asie et en Afrique. Il contraignit la Perse à lui abandonner les îles d’Ormuz, de Kischm, de Laredj, de Bahréïn, et la presque-totalité de ses côtes, depuis le cap Bostonnah jusqu’à la presqu’île de Djask. Sur la rive orientale du golfe, le littoral du Mékran, du Kerman, du Laristan et du Farsistan avec les principales cités maritimes de la Perse, comme Bender-Abbas et Lindje, obéirent à ses lois ; de même le littoral du Baloutchistan avec Guador jusqu’à la frontière de l’Inde. En Arabie même, l’empire d’Oman s’étendit, sous ce règne, sur la plus grande partie de l’Arabie orientale et de l’Arabie méridionale, depuis la presqu’île de Katar sur le golfe Persique, à hauteur des îles Bahréïn, jusqu’à la baie de Mirbat sur l’océan Indien, avec les îles de Socotora et de Kourya-Mourya. Les possessions africaines venaient encore doubler l’étendue de l’empire. Toute la côte orientale d’Afrique, depuis la baie de Quiloa, limite extrême vers le nord de la colonie portugaise de Mozambique jusqu’à l’embouchure de la Tana avec les îles de Zanzibar, de Mafia et Pemba, dépendit du sultan de Mascate. Encore faut-il joindre à cette énumération les ports de Kismayou, de Brawa, Magadoxo, Merka, Ouarschéikh sur la côte de Benadir, au-delà de la Tana. Seyd-Saïd régna sur un domaine ayant un littoral de 4 000 kilomètres d’étendue. Ses revenus s’élevèrent à 27 millions[1]. Ses sujets l’appelèrent Grand ; son royaume fut le plus florissant et le plus considérable des États que baigne l’océan Indien et devint l’entrepôt du commerce de l’Afrique orientale, de la Perse et de l’Inde.

Le gouvernement britannique voyait avec sympathie les progrès de la puissance de Seyd-Saïd et cherchait à l’utiliser au mieux de ses intérêts et au profit de la consolidation de son influence. Il conclut tout d’abord avec lui une série de traités pour la répression de la piraterie et l’abolition de la traite et installa,

  1. Voyez Palgrave, Voyage dans l’Arabie centrale, t. II, ch. XV.