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Genève, ce mercredi 23 août 1837.

« Mon cher monsieur Olivier,

« Je suis arrivé ici avant-hier soir bien fatigué, et la chaleur est telle qu’hier je n’ai pu faire que très peu des choses que je m’étais proposées ici. Je voulais dès le matin vous écrire et je n’ai pu. Je suis allé pourtant dès mon arrivée du bateau chez M. Diodati qui était sorti jusqu’à dix heures du soir et qui repartait le lendemain matin pour Vevey d’où il ne sera de retour que ce soir à six heures. J’irai le voir à sept, n’ayant que cette seule chance de le rencontrer, car j’ai tout d’abord retenu une place pour jeudi, demain matin, Lyon. J’y serai peu de jours et de là à Paris, comme je vous l’avais dit dans nos arrangemens. Mais ce qui m’est plus essentiel à vous dire que tout cela, c’est le profond sentiment de reconnaissance et d’amitié bien touchée que j’emporte du séjour d’Aigle et de cette hospitalité si cordiale et si bonne que Monsieur votre frère, Mademoiselle votre sœur et vous, m’avez donnée. C’est le souvenir que je garde et garderai à jamais de cette douce et simple vie dont les exemples m’étaient si peu connus et qui m’ont rendu tout le parfum des impressions de famille. En vous en remerciant, je ne remercie pas moins directement Mme Olivier pour tout ce qu’elle y a mis de délicat et d’indulgent. Je vais, dès mon arrivée à Paris, régler cette grande affaire[1]dont la plus difficile partie est l’affermissement de ma volonté. Je vous écrirai aussitôt le parti pris ; je ne vous enverrai aussi que de là, permettez-le, la copie des vers que je vous dois. J’ai trouvé ici les lettres en retard et d’autres encore que j’ai arrêtées au moment où on les expédiait à Aigle, et j’ai assez d’écriture pour ce matin, sans compter deux ou trois visites indispensables. Je suis allé hier faire celle que je devais à Coppet ; j’y ai trouvé les hôtes fort aimables et Mme de Staël[2]m’a parlé de M. Diodati, son beau-frère, de manière à augmenter encore, s’il se peut, mon désir et mon effort de le rencontrer ce soir. Nous nous serons vus du moins.

« Adieu, mes chers amis, veuillez croire à toute la vivacité et à toute la vérité des sentimens que je vous ai voués.

  1. Le projet du cours de Port-Royal à Lausanne.
  2. Mme de Staël-Vernet.