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Chaque pièce de cristal ou de verre à fabriquer exige le concours d’une équipe d’ouvriers, qui forment une place ; et, dans chaque atelier, on compte un certain nombre de places en rapport avec l’importance du four ; par exemple, six places ou six équipes, pour un four à six creusets. L’ouvrier, — en termes du métier, l’ouvreur, — est « le chef de place. » Il a sous ses ordres et comme servans au moins un premier souffleur, un deuxième souffleur, un grand gamin et un petit gamin. « Le petit gamin, dit M. Bontemps, a le département des cannes : il les chauffe, les met au cachon, les bat, et ordinairement porte à l’arche à recuire les pièces fabriquées. Le grand gamin apporte le pontil, chauffe la pièce empontillée (empontiller une pièce de verre, l’attacher) pendant que l’ouvreur termine la précédente. C’est le grand gamin qui (avec la cordeline) cueille les cordons, les anses. Le deuxième souffleur cueille le verre en plusieurs cueillages, commence à le marbrer et à le souffler ; le premier souffleur commence à donner les formes, et, pour certaines pièces, les empontille. L’ouvreur, ainsi que son nom l’indique, « ouvre » les pièces… Comme le principal but à atteindre dans le travail est de produire la plus grande quantité de pièces en un temps donné, de vider le plus rapidement possible un pot fondu, on a augmenté le personnel, et, au lieu de cinq, on a porté à huit, et quelquefois à dix, le nombre des coopérateurs de chaque place. Il y a un gamin qui ne s’occupe que du chauffage des cannes, un autre qui porte à l’arche les pièces fabriquées ; il y a, en outre, un gamin pour les moules, un grand gamin pour les cueillages, un autre pour les pontils. »

D’une manière générale, le gamin fait l’office du petit valet dans une ferme ou, plus exactement encore, du mousse à bord d’un navire. Avant le travail, il balaie sa place et l’arrose, afin que tout à l’heure il ne s’élève point de poussière qui, tombant sur le verre, le rendrait bouillonneux. Il prépare les outils de l’ouvreur, ses fers, ses ciseaux, ses pincettes, sa palette, sa planchette, ses compas ; dispose, s’il y a lieu, ses profils, ses mesures en bois découpé, ses fusées ; nettoie le marbre ; approche les ferrasses ; vide le baquet des écrémaisons et le cachon des fragmens de rebut, qu’on portera aux groisilleuses pour qu’elles en fassent le triage. Quand tout est prêt, l’ouvreur, qui est le maître de l’œuvre, s’assied à son banc, garni de deux bardelles ou bancs, un peu inclinés en avant, bordés sur les côtés d’une bande de