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« scolie », ou chant de table, qui s’est perdue. L’art de conduire un chœur ne lui fut peut-être pas étranger : quelques-unes de ses observations sur ce sujet permettent de le croire. Mais ce qu’il a fait de musique n’est rien ; ce qu’il a pensé de la musique, au contraire, est considérable. Caduque sur certains points, qui n’étaient pas alors fixés ou seulement connus ; contredite ou corrigée à d’autres égards par le progrès ou l’évolution ; la doctrine d’Aristote, en ses parties essentielles, est demeurée si forte et si profonde, que l’esthétique musicale s’élève encore aujourd’hui sur ses bases beaucoup plus que sur ses ruines.

Cette doctrine a compris tout l’art de son temps, et de celui du nôtre elle a deviné bien des choses. Il est peu de questions qu’Aristote n’ait posées et discutées, sinon résolues. Parmi les « problèmes musicaux, » un certain nombre ne sont que de science, et d’une science, l’acoustique, où se mêlait alors beaucoup d’erreur. « Les textes aristotéliciens relatifs à l’acoustique appartiennent à deux doctrines dissemblables et d’une valeur si inégale qu’on se croirait en présence d’écrivains différens, si dans un certain nombre de cas les deux manières de voir n’étaient inextricablement mêlées l’une à l’autre… En général les solutions proposées sont vagues, erronées ou puériles. Quelques-unes des questions même ont pour point de départ des faits manifestement chimériques. »

Il est difficile de trouver autre chose qu’un paradoxe dans la formule suivante :


Un ensemble de voix possède une plus grande puissance de transmission que la somme des voix individuelles dont il se compose.


Ailleurs, quand Aristote assure que


l’accord d’octave, chanté par des voix mixtes ou joué sur certains instrumens donne l’impression de l’unisson,


il énonce un principe acceptable, mais qui pourtant comporte et commande même quelques tempéramens. La curiosité du philosophe ou du savant s’attache aux moindres détails. Il n’est pas jusqu’à l’accident vocal, connu sous le nom de cri du coq, ou plus vulgairement « couac, » dont Aristote n’étudie, — imparfaitement d’ailleurs, — la nature et les lois.

Sur neuf problèmes qui se rapportent à l’acoustique, un seul présente un intérêt d’éthos ou de sentiment général