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serait ensuite obligée d’accepter. Les quatre groupes ministériels de la Chambre ont fortement approuvé ce projet de réunion ; on ne sait pas encore ce qu’en penseront les groupes du Sénat. Mais il faut aller au fond des choses : quel est le but de cette comédie ? Il est double : on veut à la fois se débarrasser du projet Chaumié et gagner du temps, — se débarrasser du projet Chaumié parce que, ne tenant pas assez de compte des progrès du jacobinisme, il ne correspond plus aux exigences de la situation nouvelle, — gagner du temps parce que la discussion du budget étant commencée, on ne voudrait pas qu’elle fût interrompue par une crise ministérielle. Or, la crise ministérielle apparaît clairement à l’horizon. De deux choses l’une, en effet : ou M. Combes maintiendra sa solidarité avec M. Chaumié et perdra le concours de la fraction la plus avancée de son parti, ce qui mettra sa chute à prochaine échéance ; ou il se séparera de M. Chaumié, et sans doute de quelques autres membres du cabinet, et il faudra les remplacer. Dans le premier cas, crise prochaine et complète ; dans le second, crise immédiate mais partielle, telle est l’alternative. On comprend que M. Combes préfère tout ajourner.

Mais son opinion, à lui ? Il n’en a pas, il accepte d’avance celle que les groupes réunis voudront bien lui apporter toute faite. Jamais le gouvernement n’avait été plus humble, ni plus petit ! M. Combes abandonne d’avance M. Chaumié, si les groupes le condamnent ; il le soutiendra si les groupes l’appuient. Que feront ceux-ci ? Il faudrait fermer les yeux à l’évidence pour ne pas voir que l’intrigue où on les mêle a pour objet de restaurer le monopole universitaire sur les ruines de la liberté de l’enseignement. L’Union républicaine de la Chambre, — groupe Etienne, — manœuvre pour échapper à ce dénouement ; il y sera entraîné. C’est là qu’on va par une marche oblique et louche, où le gouvernement n’a ni le courage, ni la dignité de son opinion, à supposer qu’il en ait une. M. Chaumié a la sienne ; on la connaît. M. Combes a celle des groupes ; on ne la connaît pas encore, maison la pressent. Des, deux hypothèses que nous avons indiquées plus haut, nous parierions volontiers pour la seconde : elle se réalisera en janvier.


La visite du roi Victor-Emmanuel et de la reine Hélène, qui a laissé une si heureuse impression en France, n’en a pas produit une moins bonne en Italie. Il faut bien croire que le rapprochement des deux peuples était dans leur désir latent, puisque des deux côtés des Alpes la satisfaction a été la même et qu’elle n’a été troublée par aucune