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THÉODORE ROUSSEAU


ET


LES PEINTRES DE BARBISON








Il semble qu’on soit maintenant à bonne distance des débuts de notre école moderne de paysage pour parler d’elle, et pour noter, avec un recul suffisant, les principaux traits qui font sa véritable originalité. Entre tous les maîtres qui l’ont honorée, Théodore Rousseau mérite d’être cité au premier rang. S’il n’est pas permis de le compter, comme Corot, Paul Huet, Decamps, Flers et Isabey, parmi les précurseurs, du moins il est juste de constater qu’après avoir Avec eux mené le bon combat, il a puissamment contribué à la victoire. Il marque en tout cas l’apogée de cette école.

Je voudrais essayer de faire revivre ici cette intéressante figure d’un artiste que le privilège peu enviable de mon âge m’a permis d’approcher et de connaître, dans ce village de Barbison, où il vivait alors près de François Millet, son ami. C’est là que, lassés tous deux des agitations parisiennes, ils avaient trouvé la studieuse retraite où ils se sont révélés à eux-mêmes. Leur souvenir ne saurait être séparé de cette forêt de Fontainebleau qui a été l’atelier de Rousseau et l’inspiratrice de ses meilleures œuvres. Par son absolue sincérité, par son amour de la nature et de son art, par sa ténacité au travail et cet ardent désir de perfection qui fut à la fois le charme et le tourment de toute son existence, notre grand paysagiste a manifesté un ensemble de rares qualités qu’il sera toujours bon, et qu’aujourd’hui surtout il peut être utile de proposer comme exemple.