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journaux prêtent à la Russie l’intention de proposer et de défendre l’autonomie des deux provinces ; mais la note n’en dit rien et nous ne connaissons que la note. Dès lors, on ne voit pas très bien pourquoi elle a provoqué des commentaires si pessimistes. De plus grosses difficultés ont été déjà heureusement résolues.

Ainsi le gouvernement autrichien propose, et le gouvernement russe accepte que le travail de la Conférence soit précédé et préparé par celui des chancelleries. Il est clair que, de toutes les négociations préalables, les plus importantes, et aussi les plus difficiles, sont celles qui se poursuivent entre l’Autriche et la Porte d’une part, la Bulgarie et la Porte de l’autre. Si les puissances ne sont pas obligées de souscrire à leurs résultats, quels qu’ils soient, elles en tiendront du moins le plus grand compte. Le malheur est que ces négociations sont lentes, qu’elles sont souvent interrompues, sinon rompues, enfin qu’elles marchent d’un pas boiteux. Là encore, lorsqu’on se croit sur le point d’aboutir, un coup de vent survient et tout est remis en question. On sait que l’Autriche, tout en s’annexant l’Herzégovine et la Bosnie, a évacué militairement le sandjak de Novi-Bazar, c’est-à-dire l’a restitué à la Porte ; mais celle-ci réclame encore une indemnité pécuniaire. Elle voudrait, ce qui semble légitime, que l’Autriche prît à sa charge la partie de la dette ottomane qui correspond à la valeur économique des deux provinces annexées, et l’Autriche résiste ; mais on a cru, par momens, qu’elle transigerait et que, sous une forme à trouver, elle attribuerait à la Porte des bénéfices matériels plus ou moins sérieux. Faut-il renoncer à cet espoir ? D’après les dernières nouvelles, — les dernières du moins au moment où nous écrivons, — l’Autriche proposerait maintenant à la Porte : 1° l’abandon de la protection des chrétiens en Albanie ; 2° l’augmentation des droits de douane ; 3° la nomination d’une commission pour rechercher les changemens à introduire dans le régime des Capitulations. La Porte déclare ces propositions insuffisantes. Les deux dernières ne dépendent pas de l’Autriche seule : il y faudrait encore le consentement des autres puissances, qui ne mettront sans doute aucun empressement à prendre à leur charge la dette de l’Autriche ; et quant à la première, la Porte déclare n’avoir jamais reconnu le protectorat des chrétiens par l’Autriche en Albanie. En un mot, la Porte veut de l’argent parce qu’elle en a besoin. Peu lui importe d’ailleurs qu’il lui vienne, sous une forme ou sous une autre, sous un prétexte ou sous un autre, pourvu qu’elle le touche. Là est le nœud de la difficulté.

Beati possidentes ! La Porte a une faiblesse dans la négociation :