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une mission dont le caractère n’a jamais été bien connu, car on ne s’en est pas vanté. Castro est un drôle qui ne méritait aucun ménagement. S’il est vraiment malade, ce qu’on pouvait faire de mieux pour lui était de ne pas s’en occuper et de l’ignorer. Quoi qu’il en soit, il est parti pour Berlin ; à peine y était-il arrivé qu’une révolution en a fait justice. Le vice-président, général Gomez, — ils sont tous généraux, — s’est lui-même promu, civilement, en grade et s’est proclamé président. Pour faciliter l’opération, il a découvert un complot que les partisans de Castro avaient fomenté contre sa vie. La révolution a été précipitée par l’intervention de la Hollande. Ce brave petit peuple, petit par l’étendue de son territoire, mais non pas par l’intelligence, ni par le cœur, justement indigné des vexations que Castro lui infligeait comme à tout le monde, a montré plus d’esprit que les autres, et a procédé à la capture des vaisseaux vénézuéliens. S’il avait débarqué, il aurait probablement rencontré des difficultés ; mais sur mer on peut tout se permettre. Cette solution élégante a produit un effet immédiat. Castro a pu s’apercevoir que les absens avaient tort. Il a été fort maltraité… en effigie. Chose plus grave, les crédits qui lui avaient été ouverts sur diverses banques d’Europe lui ont été retirés. Enfin il a été renversé. Espérons que le général Gomez vaudra mieux que lui. En tout cas, il a bien commencé, en donnant satisfaction à la Hollande et en envoyant un émissaire en Europe pour s’entendre avec la France et avec les autres pays que le dictateur avait lésés. De tout cela, que dit Castro ? Rien, paraît-il : il se soigne, et c’est sans doute désormais ce qu’il a de mieux à faire. Nous ne lui conseillons pas de repasser par la France : notre gouvernement ne lui enverrait peut-être pas, cette fois, même un garçon de bureau.


FRANCIS CHARMES.


Le Directeur-Gérant,

FRANCIS CHARMES.