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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




Il est un peu tard pour parler du deuil de l’Italie, mais comment ne pas le faire ? Les événemens les plus importans, les plus graves dont nous avons à entretenir nos lecteurs, et qui, vieux de quinze jours, ne sont déjà plus bien souvent qu’un souvenir presque effacé, ces événemens sont peu de chose à côté de l’effroyable catastrophe qui, à la place de deux villes florissantes, a mis deux cimetières à droite et à gauche du détroit de Messine. Un des endroits les plus beaux du monde, les plus tranquilles, les plus sourians à la vie, est devenu en quelques secondes une terre d’épouvante. L’imagination, qui aimait à y rêver doucement, recule d’horreur devant la réalité qui se dresse brusquement sur ces deux rives hier encore enchantées. La perte de plusieurs batailles n’aurait pas frappé l’Italie d’un coup plus cruel. Un parle, en effet, de cent mille morts, et ce chiffre, quelque élevé qu’il soit, ne semble pas exagéré. Quant à Messine et à Reggio, ces villes belles ou charmantes ne sont plus qu’un amoncellement de ruines. S’en relèveront-elles ? Qui pourrait le dire ? Au premier moment, on a cru et on a dit que le lourd linceul qui les couvre resterait toujours fixé sur elles comme une chape de plomb et que, dans les siècles futurs, on dirait : « Ici fut Messine, ici fut Reggio. » Mais le peuple et le gouvernement italiens ne veulent pas s’y résigner, et, dans une récente séance de la Chambre, le président du Conseil, M. Giolitti, a annoncé résolument que Reggio et Messine seraient reconstruites. La Chambre, à l’unanimité, a applaudi cette affirmation d’une espérance, d’une volonté plus fortes que la mort, et on peut dire que le monde entier en a frémi d’allégresse. Ce n’est pas, en effet, l’Italie seule qui a été atteinte par l’épouvantable cataclysme, c’est l’humanité tout entière qui ne saurait se désintéresser du sort de l’Italie, ni matériellement, ni moralement, ni historiquement. Quelle