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sacrifices étaient consentis ; mais l’idée d’une entente primait tout.

Il n’y avait plus qu’à en référer aux deux gouvernemens. Or, cet accord, si laborieusement préparé par les hommes techniques et qui devait parer aux complications et aux divers périls qu’il était facile de prévoir, cet accord, qui ménageait, sans à-coup et sans arrière-pensée, l’entente véritablement cordiale entre les deux puissances, cet accord fut écarté, simultanément, par les deux gouvernemens.

Le gouvernement français, dans une séance du Conseil des ministres présidée par M. Casimir-Perier, refusa son adhésion à l’entente négociée par le ministre des Affaires étrangères. En même temps, le Cabinet de Londres désavoua ses plénipotentiaires.

Les faits et les documens officiels seront connus un jour. Il suffit de dire, en ce qui concerne spécialement l’affaire du Nil, que la France obtenait une définition et une limitation des prétentions que l’Angleterre avait affirmées sur les régions équatoriales et que les provinces en litige étaient, en quelque sorte, neutralisées sous la haute surveillance des deux puissances.

L’échec de cette négociation fut particulièrement sensible au ministre des Affaires étrangères. La méthode droite et réaliste qu’il avait cru devoir adopter à l’égard de l’Angleterre, au moment où les difficultés coloniales arrivaient à leur période critique, était en échec. On lui reprochait un esprit de conciliation excessif. On prétendait obtenir davantage et, en parlant plus haut, faire reculer l’Angleterre bien au-delà. Les raisons qui déterminèrent le ministre à rester aux affaires, malgré l’insuccès de l’effort considérable qu’il avait tenté, appartiennent à une autre histoire.


Les pourparlers rompus, les deux parties reprenaient leurs positions antérieures. Il n’en restait pas moins que le gouvernement anglais, en traitant avec la France pour la vallée du Nil, avait admis le principe des revendications françaises. A Londres, le parti impérialiste avait blâmé vivement le Cabinet libéral. Pour répondre à ces reproches, celui-ci ne songea qu’à reconquérir le terrain perdu, et voici comment on s’y prit.

Le 28 mars 1895, le Cabinet Rosebery était interrogé, à la Chambre des communes, sur l’attitude qu’il comptait adopter au