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commission anglo-française se réunit dans les premiers jours de novembre.

Remarquons qu’au même moment personne n’ignore la marche ni l’objectif de la mission Marchand. On sait qu’il arrive sur les lieux et que M. Liotard a occupé Dem-Soliman dans le Bahr-El-Ghazal. Dans la presse anglaise, certains journaux fulminent, mais d’autres se réservent : la note moyenne paraît donnée par la Saturday Review : « Du Bahr-El-Ghazal à Fachoda l’Egypte a tout abandonné : cette portion de l’Afrique est res nullius et appartient au premier qui saura la prendre ; la question est de savoir qui arrivera le premier. On peut se féliciter de la marche rapide des troupes anglo-égyptiennes qui met l’Angleterre en bonne posture à cet égard. »

La négociation du Niger, qui vient de se rouvrir, est le prélude nécessaire de celle qui peut régler, à temps, la question du Nil soudanais. Mais que de lenteur, que de difficultés encore ! Les commissaires, MM. Lecomte et Binger, pour la France, MM. Martin Gosselin et le colonel Everett, pour l’Angleterre, discutent sur des pointes d’aiguilles ; les cartes sont insuffisantes, les itinéraires obscurs, les renseignemens contradictoires. Des journées, des semaines, des mois s’écoulent. Les plénipotentiaires anglais sont à la fois embarrassés et effrayés par l’activité des missions françaises au Niger. Si l’on ne conclut pas, tout le pays sera occupé ; mais, pour conclure, il faut consacrer les résultats obtenus : déjà les possessions britanniques sont coupées en fait de tout accès vers l’intérieur.

Le double nœud du débat s’est précisé : à qui appartiendra le Mossi dont le magnifique territoire (plus étendu que celui de la France et le plus fertile de la région nigérienne) réunira toutes les possessions soit de l’une, soit de l’autre puissance ? Quel sera le régime de navigation sur le Niger ?

Lord Salisbury, au Guild-Hall, en novembre 1897, s’écrie : « L’Afrique a été créée pour la plaie des ministres des Affaires étrangères ! »

Un temps d’arrêt se produit dans la marche en avant de l’expédition anglo-égyptienne : le bruit court que Marchand est arrivé à Fachoda.

À ce moment, quand on sent approcher l’heure où il faudra rompre ou céder, la tactique anglaise, c’est l’intimidation. Lord Salisbury, dans ce même discours du Guild-Hall, visant