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et de l’aménagement du port et de la construction de l’arsenal, et encore les manufactures de gommes de pin et de goudron à La Teste de Buch, etc.

Le voyage, qui devait se continuer au-delà de Bordeaux et sans doute jusqu’aux Pyrénées, fut arrêté, comme on sait, à Bordeaux par la maladie et la mort de Jean. La manière dont fut traité Jean est intéressante pour l’histoire de la médecine. Je diagnostique, confusément, comme on peut penser, soit une fièvre pernicieuse, soit une fièvre typhoïde. Sur quoi, comme on pense bien aussi, on saigna Jean continuellement et on le purgea sans cesse et on le clystérisa sans relâche et on lui mit des vésicatoires, des sangsues et des pigeons fendus en deux sur le cœur et sur la tête. Une consultation de Claude, car il n’oublie pas qu’il est médecin, est d’un grand intérêt : « Le chirurgien avait apporté des ventouses pour lui appliquer avec scarifications sur les reins ; mais il ne le voulut point souffrir, quoique les quatre médecins qui étaient à la consultation en fussent d’avis. Surtout le médecin portugais dit que ce remède était fort en usage en Espagne à cause des grands et prompts effets qu’il avait. Quant à moi, quoique j’avouasse que le tempérament de mon frère n’est pas fort éloigné de celui des Espagnols, je dis à M. Galathan, qui faisait de grandes instances pour les ventouses, des raisons qui lui firent connaître et presque avouer que deux palettes de sang qui sortent d’une grosse veine avec impétuosité avaient plus de pouvoir pour faire couler les mauvaises humeurs qui croupissent dans les grands vaisseaux que la même quantité que les scarifications tirent des veines qui sont dans la peau, qui sont très petites, desquelles il ne sort que le plus pur sang et dont l’évacuation peut beaucoup affaiblir. » — Évidemment.

Son frère mort, Claude revint à Blaye pour regagner Paris. Son manuscrit s’arrête net à son départ de Blaye. Il se termine de la façon la plus piquante du monde : « Nous étions dans le carrosse six maîtres (gentlemen), un valet de chambre et une femme qui avait un enfant de trois ans sur les genoux. Les cinq maîtres… La femme et l’enfant étaient des personnages un peu plus ambigus. La femme, qui était un peu sur l’âge, comme de quarante-cinq ans, avait été belle et l’enfant Tétait aussi, fort grand, fort vif et fort avancé pour l’âge que la femme lui donnait, qui se disait sa gouvernante ; nous la trouvâmes fort épleurée (sic)