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bouderie, une guerre de tarifs fut engagée ; elle dure encore.

Or les Canadiens vendent peu en Allemagne, tandis que les Allemands regrettent une clientèle que les exagérations douanières raréfient de plus en plus ; l’exportation allemande a fléchi, laissant le champ plus libre à des concurrences autrichiennes, suisses et françaises. De là, de la part de l’Allemagne, des invites non dissimulées pour reconquérir l’amitié des Canadiens ; une brochure signée E. J. Neisser, et intitulée : Allemagne et Canada, étude de politique commerciale (1908), réunit et commente les doléances des fabricans de draps, de cotonnades, de rubans, de verrerie, montre le déclin symétrique de l’industrie des fourrures importées du Canada à Leipzig, détaille, avec des argumens précis, les traits de cette décadence économique ; l’auteur conclut sur l’espoir que des relations plus amicales seront prochainement rétablies. Ailleurs, c’est une proposition de M. Ballin, directeur de la Hamburg America Linie, à de hauts officiers du Canadian Pacific, pour la mise en train d’un service hebdomadaire de grands paquebots entre Hambourg, Brème, Rotterdam et le Saint-Laurent ; le premier départ aurait lieu dès l’ouverture de la navigation, au printemps de 1909 ; par cette voie nouvelle, le Canada recevrait plus aisément les émigrans de l’Europe centrale et pourrait ouvrir à ses grains de nouveaux marchés.

Mais il est dans la nature allemande de toujours osciller entre plusieurs orientations : les Allemands recherchent l’amitié canadienne et, dans le même temps, partent en guerre contre la Préférence, qui est un des articles fondamentaux du programme de la National policy du Dominion. A la fin de l’été dernier, la Chambre de commerce de Wiesbaden écrivait à l’Association des Chambres de commerce germaniques pour leur signaler le péril d’une extension de la Préférence ; il est urgent, disait cette lettre, d’organiser la résistance de toutes les nations atteintes par le développement de ce système différentiel ; la France, qui applique aussi un régime de faveurs douanières à ses colonies, serait tenue à l’écart, mais toutes les autres puissances auraient un profit commun à faire bloc, — derrière l’Allemagne, bien entendu, — contre la Préférence impériale britannique… La Canadian Gazette, qui est une feuille officieuse d’informations hebdomadaires, publiée à Londres, écrivait à ce propos, le 8 octobre dernier : « L’Allemagne aura bientôt, nous le craignons, à reconnaître franchement que l’Angleterre et le