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prépondérance britannique, étaient des provins d’une race germanique et, comme tels, avaient droit à la protection impériale. Il a cherché, à ce moment, à réunir les élémens d’une ligue continentale contre l’Angleterre ; à plusieurs reprises, dans les mois précédens, il y avait eu, entre Paris et Berlin, échange de politesses internationales, conversations et même ententes sur des points particuliers : l’année 1895 avait vu l’accord entre la Russie, l’Allemagne et la France pour faire respecter, par le Japon victorieux, l’intégrité de l’Empire chinois, et la visite des escadres russe et française à Kiel pour l’inauguration du canal ; sous les auspices de Pétersbourg, il y avait visiblement détente entre Paris et Berlin : on n’oubliait rien, mais on « causait, » on ne craignait pas de marcher d’accord dans les questions extra-européennes. Le Cabinet de Londres, vivement sollicité par le Cabinet Ribot-Hanotaux de se joindre aux trois puissances continentales dans leur action en Extrême-Orient, avait refusé, s’était renfermé dans son isolement. A Paris cependant, les ouvertures discrètement faites après la dépêche au président Krüger, ne trouvèrent pas d’écho auprès du ministère Bourgeois-Berthelot ; l’Empereur, déçu, fit sa paix avec Londres ; quelques semaines après, il encourageait ouvertement, à la demande du roi d’Italie, la marche des troupes anglo-égyptiennes sur Dongola. L’année suivante, à propos d’une délimitation du Togoland, la conversation reprit entre le quai d’Orsay et la Wilhelmstrasse : M. Hanotaux a montré ici, il y a quinze jours, comment ces pourparlers n’eurent pas de suite.

Ainsi la politique allemande semble incertaine et tâtonnante : tantôt Guillaume II se rapproche de l’Angleterre, et c’est alors un échange de concessions ; l’Allemagne obtient Samoa, Salaga, s’installe à Kiao-Tcheou ; en revanche, l’expédition de Kitchener à Khartoum, prélude de l’affaire de Fachoda, la guerre du Transvaal, sont entreprises avec l’assentiment tacite du gouvernement allemand ; la convention de septembre 1900 lie les intérêts de l’Allemagne et ceux de l’Angleterre en Chine ; tantôt au contraire l’Empereur cherche en France ou en Russie un concours qu’il serait bien aise d’obtenir, mais qu’il ne se résout pas à payer. Malgré ces alternatives d’ententes boiteuses et de conflit dissimulé, la mésintelligence grandit entre l’Allemagne et l’Angleterre ; la presse anglaise ne cesse de dénoncer l’augmentation de la flotte allemande ; l’opinion publique, nerveuse,