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M. Reimer est sorti presque tout entier des quatre précurseurs dont nous venons de rappeler les enseignemens d’impérialisme mystique. Il aime dans Gobineau le poète épique des destinées de la race blonde[1]. Il suit volontiers les traces de M. H. S. Chamberlain quand il songe à la religion future de l’humanité germanique, bien qu’il juge ce penseur trop empressé à tenter une définition principalement psychologique du type dominateur. Il recourt pour sa part avec prédilection aux caractères physiques du Germain tels qu’ils furent fixés par les travaux de MM. de Lapouge et Ammon, et, de plus, il adopte la plupart des mesures sélectionnistes proposées par le premier de ces deux savans. Enfin Woltmann, par l’orientation de sa Politisch Anthropologische Revue, acheva de mûrir les convictions de M. Reimer et de lui fournir, au moins par la plume de ses collaborateurs, les élémens de ses propositions pratiques en vue d’un avenir prochain.

Gobineau et M. H. S. Chamberlain voient dans le sémitisme et dans la latinité, son héritière, des puissances autonomes et redoutables que le germanisme doit craindre et combattre. Après M. de Lapouge, après Woltmann, M. Reimer se montre au contraire convaincu que « le Germain seul est au Germain un ennemi redoutable » et que l’hégémonie du globe s’est disputée depuis quinze siècles entre puissances germaniques, plus ou moins conscientes de l’élément noble qui leur donnait la vigueur. L’Église romaine, la monarchie absolue de Louis XIV, la Révolution française, autant d’idées ou d’institutions qui ne furent fécondes que pour avoir été l’œuvre de Germains ignorans de leur propre race. Si les Habsbourg, héritiers du Saint-Empire, sont devenus indignes de réaliser l’idéal pangermanique de demain, c’est pour s’être attachés à l’idée désormais rétrograde d’une monarchie universelle, catholique, où prendraient place côte à côte des peuples d’extraction inégalement noble. Cette famille souveraine, traînant après elle sa clientèle de petites nations slaves, a vu Sadowa, après Austerlitz, sonner le glas de ses ambitions rétrogrades. — Une autre nation parut un instant destinée à faire triompher l’idée germanique dans le monde. C’est la France, ne nous en déplaise ! Et il faut admirer ici quel chemin ont fait dans les cerveaux bien préparés les

  1. C’est une appréciation qu’il emprunte à notre ouvrage sur Gobineau (voyez son livre Ein pangermanisches Deutschland, p. 46).