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catacombes de Rome préparèrent la réaction romaniste dont nous sommes à peine sortis. Ce fut en vain que les belles découvertes du marquis de Vogué dans la Syrie centrale révélèrent l’existence, dans l’Orient du IVe et du Ve siècle, d’une architecture chrétienne très différente de l’art byzantin et non sans analogie avec celle des églises romanes. Ni les voûtes, de structure toute romane, étudiées en Perse par M. Dieulafoy, ni les rapprochemens signalés par Viollet-le-Duc entre l’art russe et les monumens de l’Extrême-Orient, ni les ressemblances constatées par M. Choisy entre les édifices romans et les constructions persanes, ni surtout les pénétrantes études de Courajod dans ses leçons de l’Ecole du Louvre ne purent désarmer les romanistes. Plutôt que d’admettre un rapport quelconque entre l’Orient et l’Occident, on a été jusqu’à soutenir que, dans des conditions analogues, des artistes de nationalités très différentes pouvaient être conduits aux mêmes résultats et créer des formes semblables. Toutes les données de l’histoire de l’art démentent cet ingénieux paradoxe. La thèse des influences orientales, que l’on croyait morte, reparaît aujourd’hui sous une nouvelle forme, plus absolue que jamais. D’après M. Aïnalow, l’art byzantin n’est que la continuation de l’art hellénistique d’Alexandrie ou d’Antioche ; d’après M. Strzygowski, c’est dans l’Orient hellénistique, du IIe siècle avant Jésus-Christ au VIe siècle après Jésus-Christ, que se sont élaborés toutes les formes, tous les motifs, tous les styles qui ont constitué l’art du moyen âge tant en Orient qu’en Occident : l’art byzantin, l’art arabe, l’art roman ne seraient que trois branches sorties d’un même tronc.

Cette nouvelle théorie se présente dans des conditions bien meilleures que l’ancienne. Les siècles qui forment la transition entre l’antiquité et le moyen âge n’étaient guère connus jusqu’ici que par des monumens occidentaux. On pouvait parler d’art romain lorsqu’on ne disposait, pour étudier cette période, que des monumens romains ou gallo-romains ; l’expression est plus difficile à soutenir après des découvertes comme celles de l’hypogée de Palmyre et des tombes de Baouît. Les explorations de ces dernières années ont révélé en effet l’Orient hellénistique ; les tombes égyptiennes, les ruines des palais persans et des basiliques chrétiennes de Syrie et d’Asie Mineure ont livré leur secret. On connaissait autrefois des objets orientaux importés en Occident ou des monumens qu’on supposait imités de modèles