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— « L’incendie est partout ; c’est partout la tuerie ;
« Le sang couche les blés au revers des sillons ! »
Et dans le cœur obscur de la vierge attendrie
Un amour merveilleux pour sa triste patrie
Flambait comme un vitrail où saignent des rayons.

— « La France est un bûcher où se meurt l’Espérance !
« Peux-tu voir tant d’horreurs avec indifférence ?
« Eux-mêmes tes troupeaux comprennent le tocsin ! »
Et la vierge sentit s’émouvoir en son sein
Une grande pitié du royaume de France.



— « Pourquoi, gentil Dauphin, pourquoi
Vous cacher derrière vos pages ?
Vous aurez toujours l’air d’un roi,
Dans les plus simples équipages.

« Ecoutez-moi, gentil Dauphin :
L’Anglais partout tient la campagne,
Mais Dieu, qui règne, exauce enfin
Saint Louis et saint Charlemagne :

« Tous les deux ils l’ont tant prié,
(J’en ai par lui bonne assurance)
Que, vous prenant en sa pitié,
Il veut, par moi, sauver la France. »

— « Paysanne, qui donc es-tu ? »
— « Je ne sais écrire ni lire,
Mais lorsque j’aurai combattu,
Qui je suis — Dieu saura le dire !

« Pour vous porter l’ordre de Dieu,
J’ai, malgré ma famille en larmes,
Traversé le fer et le feu,
À cheval, comme un homme d’armes !