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Nos collègues arrivèrent successivement, sauf Segris, Louvet et Plichon, que la convocation n’avait pas rejoints. L’Impératrice, pour la première fois, assista au Conseil. Le Bœuf expliqua l’objet de la réunion : Le billet de l’Empereur l’avait inquiété, puis il avait eu connaissance du nouveau parti auquel le Conseil s’était arrêté : il désirait que le Conseil décidât si cette nouvelle politique était conciliable avec le rappel des réserves ; il avait expédié l’ordre à la suite de notre première résolution, mais cela ne devait pas peser sur notre délibération : si l’on croyait nécessaire de l’annuler, il en prendrait seul la responsabilité devant le pays et il donnerait sa démission. Gramont ne nous laissa pas le temps de discuter cette éventualité. Il mit sous nos yeux des dépêches et télégrammes arrivés depuis que nous avions quitté les Tuileries, ainsi que le rapport de Lesourd sur l’attitude de Bismarck à Berlin pendant la journée du 13, les derniers télégrammes d’Ems, et des télégrammes de Berne et de Munich. Lesourd nous exposait que, depuis la nouvelle de la renonciation, on s’était départi à Berlin du calme qu’il avait constaté depuis une semaine et que l’irritation avait tout à coup succédé au sang-froid ; il nous racontait les impressions pessimistes que Loftus avait rapportées de son entretien avec Bismarck. Benedetti, d’un ton embarrassé, nous mettait au courant des faits que l’on connaît de la dernière journée d’Ems. Mais bien plus grave et plus significatif était le télégramme de Berne ! Ce télégramme (4 heures et demie) de Comminges-Guitaud, notre ministre, était ainsi conçu : « Le général de Roeder a communiqué ce matin au Président un télégramme du comte de Bismarck annonçant le refus du roi Guillaume de s’engager, comme roi de Prusse, à ne jamais plus donner son consentement à la candidature du prince Hohenzollern, s’il en était de nouveau question, et le refus également du Roi, à la suite de cette demande, de recevoir notre ambassadeur. » Cadore, notre ministre à Munich, disait : « Je crois devoir vous transmettre la copie à peu près textuelle de la dépêche télégraphiée par M. le comte de Bismarck : — « Après que la renonciation du prince Hohenzollern a été communiquée officiellement au Gouvernement français par le Gouvernement espagnol, l’ambassadeur de France a demandé à Sa Majesté le Roi, à Ems, de l’autoriser à télégraphier à Paris que Sa Majesté s’engageait à refuser à tout jamais son consentement, si les princes de Hohenzollern revenaient sur leur détermination. Sa Majesté a