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Autrichiens s’étant retirés de Bologne, évacue Ancône, sans avoir obtenu ces garanties. Duchâtel, Thiers, Guizot, Broglie le lui reprochent au Parlement[1]. Palmerston subordonna la fin de la guerre de Crimée à l’obtention des « garanties pour l’avenir contre les nouvelles entreprises possibles de la Russie[2]. » La Prusse et l’Allemagne ne cessèrent de réclamer du gouvernement danois des garanties pour l’avenir en faveur des Allemands établis dans les Duchés. En 1869, lorsqu’on parla de la candidature Hohenzollern une première fois, si l’Empereur, fidèle aux exemples des politiques sérieux, n’avait pas regardé seulement au présent, s’il avait pris des sûretés pour l’avenir, il n’aurait pas été surpris par le guet-apens prusso-espagnol : on lui reprochait cette imprévoyance. Devait-il la commettre de nouveau, laisser ouverte la possibilité d’une troisième alerte ? Il fallait donc assurer l’avenir en demandant au roi de Prusse, non seulement l’approbation du retrait de la candidature, mais une garantie formelle qu’il n’autoriserait pas les princes à la renouveler.

Ces raisonnemens, en thèse, n’étaient pas dépourvus de vérité. Il est incontestable que, quand une affaire s’assoupit momentanément, il est prudent de prévoir par des garanties un recommencement possible. Mais tel n’était point le cas. L’aventure avait eu des conséquences si pénibles pour tous ceux qui y avaient été mêlés qu’on ne pouvait leur supposer la tentation de la recommencer, et le roi de Prusse, qui s’y était engagé à contre-cœur, ne voudrait certes plus en entendre parler. De plus, quand on délibère si l’on doit ou non accomplir un acte, il ne suffit pas de le considérer en lui-même : il faut tenir compte des circonstances au milieu desquelles il se produira. L’acquiescement du Roi à la demande de l’Empereur eût produit des conséquences déplorables pour lui. Si à la renonciation qui, malgré tous les démentis, lui était attribuée il avait ajouté un engagement quelconque, une clameur universelle se fût élevée contre son humiliation : c’était précisément la perfidie de la Droite d’avoir soulevé une exigence à laquelle il était impossible que notre adversaire fît droit. La demande de garanties ne pouvait être interprétée que comme une volonté d’amener la guerre.

La plupart des meneurs de la Droite (il convient toujours de faire une part aux sincères) se souciaient peu et de l’Espagne,

  1. Séance de la Chambre du 12 janvier 1839.
  2. Lettre de Palmerston à John Russell, 28 mars 1855.